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Reviews

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A Contresens

Wave Records & Young and Cold Records

A CONTRESENS Réédition 2024

Forces Parallèles

Richard

Juillet 2024

Il fut un temps où le bonheur était simple comme un coup de fil. En 2024, il est dorénavant simple comme une réédition discographique. On ne peut dès lors que remercier chaudement Wave Records le label brésilien d' Opéra Multi Steel de nous offrir enfin la possibilité d'entendre le deuxième album des Berruyers sorti en 1988. Il était en effet bien difficile sous la forme physique de se procurer aussi bien l'édition originale que sa réédition de 2000 à un prix décent. La passion, c'est bien, mais lorsqu'elle n'équivaut pas au PIB de la Suisse, c'est encore mieux pour le porte-monnaie. A Contresens est donc une nouvelle occasion délicieuse de plonger littéralement dans un monde baroque qui ne connaît définitivement ni barrière, ni contrainte.

Le projet de Bourges avec ces huit titres consolide encore un peu plus une identité qui bien que récente est objectivement déjà unique. En 1985, avec « Cathédrale », Opéra Multi Steel a ainsi exposé aux très rares auditeurs qui ont eu simplement la chance de pouvoir l'entendre un monde atypique. C'est la rencontre d'une synthpop aux effluves cold wave avec un imaginaire qui convoque entre autres imagerie religieuse du début du siècle dernier, nostalgie de l'enfance et souvenirs de ses protagonistes. Le trio devenu quatuor reprend plus ou prou les mêmes éléments mais il semble avoir voulu pousser jusqu'à ses propres limites cet univers absurde et tellement attachant.

Évidemment, et c'est peu de le dire, A Contresens a de quoi surprendre, parfois irriter mais il ne peut laisser indifférent. Il demeure même quasiment quatre décennies après sa parution difficile à décrire. Essayons quand même ! Opéra Multi Steel, c'est à priori une salvatrice autodérision soutenue par une basse typée cold bien mise en avant et des claviers tombant en cascade. Si à l'image des excellents "Les Grands Orchestres" et "Les Sens", l'ensemble parait un peu partir dans toutes les directions, l'auditeur se retrouve rapidement pris dans un tourbillon complexe de mots sibyllins et de notes enivrantes. Cette hétérogénéité qui s'exprime avec malice durant les premières années du projet est donc l'essence même d' A Contresens.

Pour être réceptif, on se doit sans doute de ne rien attendre. Le résultat sera alors assurément à la hauteur. Aux effluves simili-religieux qui accompagnent la lente procession qu'est "Las" répond le superbe conclusif "Oraisons minimes" qui épouse des contours folk incertains. Comme souvent avec Opéra Multi Steel, il faut se laisser porter, ballotter au gré des voix des frères Lopez et de celle de Catherine Marie. Le travail sur celles-ci mérite toujours une attention particulière. Ainsi, à travers le loufoque éponyme et ses effets déconcertants ou le hors-sol "Paulette à la Plage" et ses fameuses socquettes et cacahuètes se dévoile toute l'attractivité du projet. A l'image de "J.l' Aveugle", on ne sait jamais vraiment sur quel pied danser. Sérieux, kitsch, froid, pop, faussement je-m'en-foutiste, il n'est toujours pas possible d'en décliner l'identité. C'est bien tout son intérêt et le sel de l'ensemble.

Opéra Multi Steel offre donc avec A Contresens un album déconcertant et inclassable. Les années 80 si souvent décriées pouvaient aussi proposer des choses à la fois étranges et accessibles. Écouter cet opus, c'est s'offrir un grand bol frais de liberté artistique et comprendre également pourquoi le groupe de Bourges dans les mondes sombres est culte. Essentiel, tout simplement.

Les Passions tristes

Wave Records/Young and Cold Records

LES PASSIONS TRISTES

PersonaEdition.com

Paskal Larsen

Avril 2023

Avec Norma Loy, Trisomie 21, le groupe de Bourges Opéra Multi Steel, fait partie des groupes new-cold wave-gothic-electro-indus français des années 80 encore en activité, avec à ce jour et la nuit, la publication de 13 albums, dont le nouveau titré : Les Passions tristes. Certes Guerre Froide s’est remis en piste dans le courant des années 2000 et Martin Dupont vient de réapparaitre avec un nouvel album titré Kintsugi, mais Opéra Multi Steel n’a pas lâché prise depuis 1983, année de leur mise en route, avec en prime le même line-up : Franck Lopez (voix, guitare acoustique, flûtes, synthés, boite à rythme), son frère Patrick L. Robin (voix, percussions, mélodica) et Catherine Marie (synthétiseurs, basse, voix). Au programme de l'opus Les Passions tristes, 13 morceaux où « haine, fanatisme, peur irrationnelle, colère, remords incontrôlés, mensonge, violence, ressentiment, obsessions mortifères, regrets envahissants », sont évoqués, sans heureusement tomber dans le négatif cérébral plombant. Au contraire, la musique électro-synth- wave est limite légère, presque pop, avec sa tonalité électro, permettant à certains moments de lâcher prise pour danser. Le morceau "A La Messe ou aux Vêpres" en est un bon exemple, avec sa mélodie qui a l’allure d’un hit pour passer une bonne soirée électro-goth. Pour les fans du groupe, si l’électro a ici une belle présence (on pense un peu à Gary Numan), le côté Gothic, messe païenne de minuit est toujours de la partie. Ainsi en 2023, après 40 années de bonnes vibrations, Opéra Multi Steel est plus en forme que jamais. C’est sûrement le froid au contact des vieilles pierres des chapelles, églises et cathédrales qui conserve ce groupe, ici au meilleur de sa création artistique, tant musicale que visuelle (pochettes, clips). Le beat électro mélangé au rituel médiéval est magnifiquement dosé et efficace à l’oreille. En prime, les textes en français donnent une touche encore plus personnelle et unique au groupe. Il y a un morceau qui a pour titre "Triomphale", c’est clair, ce mot est tout destiné à Opéra Multi Steel, ici en "Etat de Grâce".

Les Passions tristes

Wave Records / Young and Cold Records

LES PASSIONS TRISTES

Forces Parallèles

Richard

Avril 2023

Ceci pourra peut-être vous surprendre, mais la scène hexagonale underground, même en 2023, demeure à de nombreux égards des plus intéressantes. Elle peut se targuer de posséder ainsi en son sein des formations qui ont quatre décennies d'existence et plus d'une dizaine d'albums au compteur. Vous pourriez légitimement me rétorquer que longévité et quantité ne sont pas nécessairement gages de qualité. C'est vrai, mais c'est pourtant bien le cas par exemple avec Opéra Multi Steel. Ce projet originaire de Bourges a rarement été pris en défaut sur le plan artistique. Mieux, en toute discrétion, il a réussi à édifier une architecture portée par des notes et des mots foncièrement atypiques.

A l'heure d'une synthpop le plus souvent fade, se pencher sur une nouvelle production du trio est normalement une promesse de satisfaction auditive. Ce treizième album fait donc suite au superbe et introspectif D'une Pierre deux Tombes qui soulignait de belle manière la pertinence toujours actuelle du propos d'Opéra Multi Steel . C'est l'une des forces des Berruyers. Proposer d'emblée un univers reconnaissable sans pour autant être dans la redite. Une oreille distraite y trouvera peut-être comme un tableau sonore aux couleurs identiques alors qu'une autre, plus attentive y décèlera, elle, de légères variations qui font aussi l’intérêt des Passions Tristes.

Sans pour autant faire table rase du passé, le projet matérialise ainsi son envie de renouveau par la présence d'effluves électro plus prononcés. Opéra Multi Steel ne fait pas encore et heureusement dans le sombre et insipide dansant façon Clan of Xymox, mais le rythme marquant des enlevés "A la Messe ou Aux Vêpres" ou surtout "Le Chant des Signes" a de quoi surprendre même les habitués du projet. Malicieux, le trio retombe toutefois sur ses poulaines en mariant ses pulsations électroniques avec sa fameuse flûte comme le souligne avec réussite le prenant "Tout en Tous" où l'orgue impromptu d'"État de Grâce".
Les Passions tristes durant cette heure originale s'étirent parfois un peu en longueur. C'est sans doute le seul reproche à leur adresser. L'album est gourmand, trop généreux sans doute. Ceci, sans être dommageable, nécessite une attention certaine car les mots portés par Patrick L. Robin, s'ils laissent libre cours à un imaginaire virevoltant et débordant, sont le plus souvent cryptiques. Sa voix toujours aussi limpide contribue fortement à l'adhésion de l'ensemble comme l'expose l'attractif "D'arborescences" tout en étrangeté synthétique. Comme il est d'usage avec le trio, c'est un monde tout en équilibre qu'on nous invite alors à découvrir. La dérision sautillante partage l'espace à parts égales avec la tristesse sincère.

Si Opéra Multi Steel perdure, c'est aussi et surtout parce que ce projet ne sonne comme aucun autre. L'auditeur à travers ce périple qui convoque tout ce que nous pouvons avoir de plus sombre en nous, partage ainsi des temps d'introspection à l'image des émouvants "A nos moments perdus" ou "Les Toiles" ou d'humour toujours distant avec "Tombés à Terre". Les Français, avec leur habileté coutumière, parsèment leurs morceaux d'extraits de films, de samples vocaux (le superbe "Le Soleil est parti") et les nourrissent de leurs thématiques habituelles. Il en résulte un sentiment unique où l'auditeur est pris de nouveau dans une forme de transe hypnotique.
Les Passions tristes sont donc encore l'expression d'une créativité sans faille. Opéra Multi Steel avec son goût du paradoxe original poursuit son petit bonhomme de chemin synthpop. Alors, à quand le nouvel album ?

Les Passions tristes

Wave Records / Young and Cold Records

LES PASSIONS TRISTES

VerdamMnis Magazine

Tanz Mitth'Laibach

Mars 2023

Après la mort, le désespoir ? C'est en tout cas ce que paraît annoncer la couverture de Les Passions tristes d'Opéra Multi Steel, qui succède à D'une Pierre deux Tombes. La pochette est en effet ornée du magnifique tableau de Pascal Dagnan-Bouveret Marguerite au Sabbat, que l'auteur de ces lignes a pu voir pour la première fois au même endroit que les musiciens, au Musée de Cognac un lendemain de concert ; on y voit Marguerite, l'amante abandonnée par Faust dans l'une des pièces de Goethe, apparaissant au milieu des flammes de l'enfer avec son enfant qu'elle a assassiné au comble du désespoir... Allons bon : on connaît Opéra Multi Steel mieux que ça, depuis quarante ans que sévit le groupe de synthpop français aux ambiances médiévales ; on sait que quand bien même l'album est consacré à des sentiments destructeurs, ils seront toujours abordés avec force dérision blasée !

Les Passions tristes nous plonge en effet dans d'étranges états d'esprit, où la mélancolie n'est jamais loin et où pourtant l'on ne cesse de s'agiter à la recherche d'autre chose. C'est que les passions, même tristes, ne manquent pas d'énergie. L'album est dansant, on suit avec entrain la boîte à rythmes et les percussions, largement mises en avant ; comme c'est souvent le cas avec Opéra Multi Steel, les nappes synthétiques glissent les unes sur les autres, ici plus aigües et plus douces que les atmosphères lourdes de D'une Pierre deux Tombes, le chant et les paroles se montrent volontiers joueurs, à l'instar de la flûte qui fait quelquefois irruption, héritée des influences folk-médiévales de Franck Lopez. Le disque est plus rapide et entraînant que son prédécesseur. Mais sous l'énergie et la légèreté apparente, on trouve rapidement l'obsession avec tout ce qu'elle peut avoir de malsain. Le chant se fait triste et se perd dans la réverbération, les rythmes sont mécaniques, des samples variés confèrent une soudaine gravité à l'ensemble comme le font les interventions de l'orgue sur "Etat de Grâce" ou "Tombés à Terre", la voix en arrière-plan de Catherine Marie introduit une résonance fantomatique comme c'est le cas sur "Dites-nous". Jamais loin, la distance et l'ironie nous empêchent pourtant de tout à fait nous laisser nous perdre dans ces Passions tristes. Elles ressortent parfois dans les paroles quelque peu hermétiques de Patrick L. Robin, éclatent lorsque l'on reconnaît dans "D'Arborescences" un extrait de la célèbre vidéo "Mais t'es pas net, Baptiste !", cocasse référence culturelle que l'on n'attendait ni d'Opéra Multi Steel, ni sur ce morceau ! Ce n'est que l'un des nombreux samples vocaux qui hantent l'album, induisant des décalages qui peuvent être aussi bien amusants que déstabilisants.

Les Passions tristes est donc un univers musical riche. On vagabonde dans la déréliction, pourtant toujours protégé d'elle par une bulle de dérision ; la plongée est plaisante et originale. Un morceau se dégage immédiatement comme le tube de l'album : "Le Soleil est parti", avec ses paroles mystérieuses et son électronique à la fois dansante et disjointe, est un petit bijou de décalage. On pourrait aussi souligner le jeu entre la flûte et l'électronique sur "Tout en Tous" qui est d'ailleurs le seul morceau dont les paroles sont retranscrites sur la jaquette du cd, la mélancolie de "A nos Moments perdus" ou de "Les Toiles"... Et puis il y a la particularité de "Au grand Jamais", morceau sinueux où Catherine Marie assure le chant principal et qui nous renvoie à "O Quam Tristis...", side-project puisant dans la liturgie latine qui regroupait les membres d'Opéra Multi Steel et Carine Grieg de Collection d'Arnell-Andréa dans les années 2000. Au terme de ce foisonnement, ce n'est pas sans ironie que l'on songe que Les Passions tristes du groupe ont tout pour nous réjouir.

Les Passions tristes

Wave Records/Young and Cold Records

LES PASSIONS TRISTES

Obsküre Digital Media

Emmanuel Hennequin

Avril 2023

Après D’une Pierre deux Tombes (2021), au contenu grave et lié à un contexte de deuil (disparition des mères, disque hommage aux parents), la formation française signe un retour avec un disque aux formes ambivalentes : minimalisme affûté pour ce projet de vie en la production duquel se reconnaît la marque mais dont la tonalité oscille davantage, en 2023, entre clair et obscur. Cette ambivalence caractérise et fait l’épice du cru nouveau.

Quarante ans d’existence pour le projet aujourd’hui animé par les fondateurs Patrick L. Robin, Franck Lopez (actif en parallèle dans Collection d’Arnell-Andrea) et Catherine Marie, formation ayant retrouvé sa forme d’origine depuis 2018. Opéra Multi Steel cultive aujourd'hui, encore et toujours, une singularité… et ça ne date pas d’hier, le trio ayant dès ses origines eu maille à partir avec la résistance des milieux indie, se réfugiant à l’époque dans les vertus et solutions du do it yourself.

La marque de fabrique réside encore et toujours en cette forme aux apparences rudimentaires (simplicité des aplats, relief synthétique, minimalisme de rigueur). Mais le son est issu d’un temps postérieur à D’une Pierre deux Tombes et, naturellement, diffère : il y a quelque chose, dans l’attitude, de plus… joueur, allègre. Le groupe, par un dosage de positivité, a réarmé son esthétique musicale : la gravité d’approche au chant n’est pas démentie, jamais surjouée. Les voix s’insèrent dans des ensembles invitant plus ouvertement à la danse ("Le Soleil est parti", dont la vidéo s’appuie sur le Faust de Murnau). Opéra Multi Steel joue aussi avec les effets ("D’Arborescences"), avec les sources (l’une d’elles, dans "D’Arborescences" toujours, un extrait célèbre : "Mais demain, comment tu vas te lever ?", trouve son explication dans une vidéo virale).

La répétition des motifs, leurs tournures hypnotiques et leur imprégnation par un feeling médiéval confèrent immanquablement au son du groupe son atypie. Les Passions Tristes agissent en trompe-l’œil. Soigneux jusque dans son visuel (la pochette est un visuel d’Herman Czauski prenant pour base Marguerite au Sabbat, œuvre originale signée du peintre naturaliste Pascal Dagnan-Bouveret exposée au Musée municipal de Cognac), Opéra Multi Steel signe une nouvelle œuvre paradoxale et d'autant plus originale : signe qu’envie et inspiration peuvent ne pas se tarir, même après quarante ans d’activité. Certains musiciens, comme on dit, "en ont en réserve". 2023. Les reconnaître, les redécouvrir.

Les Passions tristes

Wave Records / Young and Cold Records

LES PASSIONS TRISTES

Soil Chonicles

Chris Metalfreak

Octobre 2023

Quarante ans, quand même !
Depuis quatre décennies, Opéra Multi Steel nous déverse son hybride coldwave / electro / synthpop sur un rythme régulier digne d’une horloge de cathédrale, avec un univers qui lui est propre et au son identifiable dès la première seconde.
Pendant ces quarante années, inutile de chercher un mauvais album d’OMS : y a pas !
Découvert, pour ma part, en 1988 avec “A contresens”, j’avais de suite été séduit par leur univers.
Et ce ne sont pas quelques albums suivis aléatoirement par la suite qui avaient changé cette impression avec comme point d’orgue “La Légende dorée” (2010), qui reste un des albums du trio que j’ai le plus écouté… et adoré. Des titres comme “Karma sous trame”, “Au Sein de l’Essence même”, “Sainte So”, et surtout les merveilleux “Perdre connaissance” et “Homélie mélodique” font encore partie de mes playlists.
C’est aussi à ce moment-là qu’il y a eu une prise de conscience concernant la richesse, tant de leur textes, que de leur musique fortement influencée par le Moyen Âge, autant que par la religion, Opéra Multi Steel puise son inspiration dans des références culturelles, religieuses ou historiques, avec un sens du jeu de mot subtil bien présent, pour un certain décalage humoristique bienvenu, au milieu d’une mélancolie, certes impalpable, mais bien présente.

Jusqu’à “La Légende dorée” (premier album sorti sur l’excellent label Wave Records), titre d’un ouvrage en latin écrit entre 1261 et 1266 par Jacques de Voragine (dominicain et archevêque de Gênes), qui raconte la vie d’environ 150 saints ou groupes de saints, saintes et martyrs chrétiens, et certains événements de la vie du Christ et de la Vierge Marie), je n’y voyais qu’un groupe à classer à côté des excellents Trisomie 21  qui nous proposaient une vulgaire coldwave à la boîte à rythme et au chant monocorde. Bien qu’aimant ce concept, je n’approfondissais pas mes écoutes, me contentant d’écouter avec plaisir comme on s’écoute machinalement un album de tout-venant à classer entre le précédent et le suivant. Putain, quel con je fus !

Mais depuis, le regard et l’écoute ont bien changé.
C’est avec un autre état d’esprit que les albums entre “Mélancolie en Prose” (2013) jusqu’à “D’une Pierre deux Tombes” (2021) ont été appréhendés, me rendant compte d’une richesse – définitivement un des mots-clés pour décrire au mieux la musique d’Opéra Multi Steel – insoupçonnée jusqu’alors.
Et c’est aussi là que le trio montre qu’il est capable d’évoluer au niveau musical : c’est à compter de “D’une Pierre deux Tombes” que sa musique s’enrichit considérablement d’éléments plus électro qu’avant, certes sans pour autant verser dans un dancefloor qui contrasterait trop avec la solennité religieuse habituelle, avec en prime quelques petits samples disséminés un peu partout. Et surtout, cette capacité de créer des couplets et des refrains imparables, addictifs dès la première écoute.

En treize titres pour plus d’une heure de musique, OMS poursuit son évolution amorcée sur “D’une Pierre deux Tombes”, sans pour autant se révolutionner : faire du neuf avec de l’ancien, du changement dans la continuité ?
Un peu de tout ça : si le trio évolue, il ne se renie pas, loin de là.
Mais ces changements ne risquent pas de faire fuir les anciens fans et pourraient en grapiller de nouveaux : tout en restant fidèle au son particulier qui le caractérise, OMS l’enrichit de rythmiques plus électro auxquelles nous n’étions pas habitués. Les titres ont un tempo plus enlevé que d’habitude aussi, même si le groupe aime se faire plaisir avec des titres plus intimistes, aux ambiances plus sombres, voire recueillies, qu’il affectionne depuis ses débuts.

Cet album est une pure réussite de la part d’Opéra Multi Steel, sans doute aussi le plus varié et le plus ambitieux, et toujours d’une richesse musicale et textuelle remarquable.
Même l’artwork fait preuve d’une recherche élaborée : réalisé une nouvelle fois par Hernan Czauski à partir du tableau “Marguerite au Sabbat“ du peintre Pascal Dagnan-Bouveret (1852-1929) réalisé en 1911, lui-même inspiré du mythe de Faust et, pour la petite histoire, le clip du titre “Le Soleil est parti” comporte des scènes au film “Faust” de Friedrich Wilhelm Murnau tourné en 1926 .

Jusque-là, “La Légende dorée” restait pour moi l’album référence d’Opéra Multi Steel, “Les passions tristes” pourrait bien le détrôner.
En clair, indispensable !

D'une Pierre deux Tombes

Wave Records/Meidosem Records

D'UNE PIERRE DEUX TOMBES

Forces Parallèles

Richard

Mars 2022

Opéra Multi Steel pourrait s’apparenter volontiers à un petit jardin secret dont l’entrée serait jalousement gardée alors qu’elle ne demande assurément qu’à être découverte en fait par le plus grand nombre. Il est un précieux projet sur lequel le temps semble définitivement ne plus avoir de prise. Le trio originaire de Bourges et qui a débuté son histoire au début des années 80 a réussi à faire de ses souvenirs intimes des thèmes non pas exclusifs mais totalement ouverts. Le combo par la qualité de ses mots a donné au particulier un caractère universel. « D’une Pierre deux Tombes » ne déroge aucunement à cette règle qui est l’essence même des Berruyers. Ce douzième album a en effet pour thème principal la mort.

Quoi de plus personnel en effet et en même temps de plus universel que la perte ? Il s’agira en l’occurrence de celle de la maman de Catherine Marie et de celle des frères Patrick L. Robin et Franck Lopez, décédées toutes deux en 2018. Cette appartenance à un univers unique, à ce jardin secret ouvert, je l’avais déjà ressentie un samedi gris de mai 2011 à Cherbourg lorsque l’essentiel Stanislas Chapel de l’association Trinity avait organisé un concert d’OMS. Catherine Marie avait débuté cet excellent set de deux heures trente par une petite distribution de bougies aux spectateurs. Un peu comme si l’auditeur se devait d’entretenir la flamme fragile de ce fascinant ensemble. Ecouter Opéra Multi Steel, c’est indéniablement prendre une part active dans ce processus de transmission. Face au deuil comme pour se rassurer et nous-aussi par la même occasion, le trio expose à l’auditeur ce qu’il fait de mieux depuis ses origines.

A travers douze titres, le combo propose de nouveau son intéressante synth-pop, à la fois grave et joueuse, teintée volontiers d’effluves médiévaux. A ce monde étrange, viennent s’allier des mots déstabilisants et sibyllins. La source particulière qui irrigue ces quatre décennies artistiques n’est pas encore tarie.

Dès les premières secondes de l’excellent et introductif « L’Annonce » sur un rythme effréné que rien ne semble pouvoir arrêter s’entrechoquent synthétiseurs et lexique bien rare en chanson hexagonale (« Salem, Golem, Carême ou Baptême »). C’est tout simplement encore une fois savoureux. Si l’atmosphère générale pourrait légitimement être plombante à l’image de l’émouvant et pesant « L’Après-Mort » aux airs de procession funèbre, Opéra Multi Steel n’en oublie pas comme à son habitude son humour et son ton décalé. Aussi ne faut-il pas être surpris par l’entêtant « Sérum de l’Humanité », quand l’inquiétant Ron Perlman (aka Salvatore dans le Nom de la Rose d’Annaud) vient ponctuer le morceau avec ses cultes « Penitentia agite ».

Opéra Multi Steel par cette dérision certaine adoucit sans doute partiellement ses maux. Mais le propos n’en demeure pas moins toujours sincère et naturellement touchant. La belle trouvaille de la pendule à coucou qui ponctue par exemple certains titres rappelle avec une désarmante simplicité que si le temps passe, les souvenirs et les êtres chers, eux, subsistent. Certaines ambiances rappellent aussi que le groupe vit le jour aux premiers balbutiements des vagues froides. Ainsi le très New Order  « D’une Pierre deux Tombes », relevé par la voix persuasive de Catherine Marie, ou l’introduction cold wave de « Ainsi de Suite » givrent pendant quelques instants l’ensemble. Les mots reprennent rapidement le dessus et, à l’image de « Saint-Siège » et de son orgue discret, confèrent une chaleur évidente qui atténue la mélancolie drapant chaque morceau. Il les aime, ces mots, le trio. Ils sont malaxés, triturés. En les faisant danser de cette sorte, ils deviennent un instrument à part entière qui s’emboite parfaitement par exemple avec ces puissants claviers et autres flûtes (le superbe « La Nuit des Doutes »). Le deuil se fait ainsi moins noir.

J’ai souvent évoqué dans mes chroniques le caractère passionnant des univers sombres. Opéra Multi Steel avec « D’une Pierre deux Tombes » en est encore une fois un très bel exemple. Le trio avec imagination et émotion se joue ici de la mort comme pour mieux l’apprivoiser, voire pourquoi pas en rire. Cet album est sans conteste l’une des meilleures productions de ce groupe en tout point unique.

D'une Pierre deux Tombes

Meidosem Records & wave Records

D'UNE PIERRE DEUX TOMBES

PersonaEdition.com

Paskal Larsen

Février 2022

Opéra Multi Steel est un groupe coldwave/gothique/baroque/médiéval de Bourges qui s’est formé en 1983, soit bientôt 40 années passées sous la brume et dans les cathédrales (le mot "Cathédrale" est le titre de leur premier album en référence à la cathédrale de Bourges) avec vue sur le cimetière. Malgré les années, le trio est resté fidèle à son line up, soit Franck Lopez (voix, guitare, basse, synthés), son frère Patrick L. Robin (voix, flûte, mélodica) et Catherine Marie (synthétiseurs, basse, voix), ainsi qu’à son style musical. La preuve avec la sortie du douzième album au titre explicite, "D’une Pierre deux Tombes" et les photos de la pochette qui montrent des œuvres gothiques religieuses en provenance de pierres tombales sculptées au XIXème siècle. Comme une obsession avec la mort, le noir, le recueillement, encore aujourd’hui les morceaux ont pour titres : "Jardin du souvenir", "Cimeterre", "Les Immortelles", "L’après-mort" et en bonus sur le CD "Sérum de l’Humanité" avec un air d’Étienne Daho dans la voix. Justement, sur "Pistes Noires", l’album tribute/hommage à Daho, Opéra Multi Steel reprend le morceau "Bleu comme toi", extrait de l’album "Pour nos Vies Martiennes" (1988). Le lien avec la mort, le recueillement est ici encore plus prononcé, car les trois membres du groupe ont perdu leurs mères en 2018, ainsi l’album est un hommage posthume à leurs mamans. A noter que sur la version CD de l’album, après chaque titre, on entend le son du vieux coucou familial, celui qui était sur le mur de la mère de Patrick et Franck. On y entend également le dernier enregistrement vocal adressé à Patrick par sa mère. Le deuil est le ciment de ce nouvel album tombal.

Si dans le courant des années 80, il y avait de nombreux groupes français qui brassaient de la musique cold (Seconde Chambre, Trop Tard, Asylum Party, Rosa Crux, Résistance, Clair-Obscur, Guerre Froide, Norma Loy et Collection D’Arnell-Andréa qui est l’autre groupe dont fait partie Franck Lopez), au fil des années, d’autres styles musicaux ont pris le relais chez les groupes d’ici (noise, HC, garage rock, électro). Mais Opéra Multi Steel tient bon, sans heureusement tomber dans sa propre caricature. Faire de la cold portée par le médiéval, le religieux quand on a vingt ans, cela fait partie de la mélancolie qu’on disperse dans notre jeunesse, face à l’entrée dans le monde adulte lié au travail, à fonder une famille, à devenir une personne responsable. La musique gothique et punk, permet de retarder ce passage vers les responsabilités à assumer. D’autant que les titres des disques tous formats du trio (parfois quatuor) n’ont pas hésité à travers les décennies, à utiliser des phrases, mots, bien connotés gothique, la jeunesse qui s’enfuit : "Eternelle Tourmente"(1986), "Je regarde la pluie"(1987), "Regret qui s’écaille"(1989), "Les douleurs de l’ennui"(1990), "Les Martyrs"(1991), "Mélancolie en prose"(2013). Bref, nos trois quinquagénaires prouvent avec ce nouvel album, que le genre « musique gothique » tient bon en 2022, toujours avec grâce et style. Oui, cet album et sa poésie funèbre (macabre ?) permet de nous échapper de notre quotidien. Comme on prend plaisir à admirer une œuvre de Francis Bacon ou un film de Guy Maddin, on prend plaisir à écouter les huit morceaux du vinyle  (douze pour la version CD), de cet album aux couleurs des années 80, tout en gardant un pied, non pas dans la tombe, mais dans l’époque actuelle, notamment avec ici et là des sons électroniques qui dynamisent le spleen intemporel des compos d’Opéra Multi Steel… toujours debout et fier, non pas de ne rien faire (ref. le tube des Olivensteins) mais d’être toujours aussi inspiré par le travail créatif.


Cathédrale 35th

Wave Records & Meidosem Records

CATHEDRALE Réédition 35th

Side-Line

Bernard

Janvier 2021

«Cathédrale» est le tout premier album studio d'Opéra Multi Steel, sorti à l'origine en 1985. Basé sur les sons de synthés analogiques et boîtes à rythmes mythiques de nos jours (Elex E, Roland TR606, Yamaha MR 10, Casio VL 1 entre autres…) le groupe mélange ces ingrédients électroniques avec des instruments acoustiques tels que des guitares ou des flûtes, et des voix mélodiques puissantes. Le mix a parfois été qualifié de Medieval Minimal Wave et est audible dans tout le catalogue du groupe.

Cet album comprend plusieurs classiques du groupe, "Cathédrale" bien sûr mais aussi "Un Froid seul", "Frantz est mort" ou encore "Du Son des Cloches".

Cette réédition est l'occasion de redécouvrir ces chansons dans leurs versions originales sur le support qui les a vus naître, emballées dans une pochette conçue afin de respecter l'ambiance développée au moment de la sortie originale. L'édition spéciale 35e anniversaire, a été masterisée par Marcelo Gallo (Pitch Yarn of Matter) et se décline en 2 versions différentes sur vinyle, ultra clair avec des éclaboussures noires et ultra clair avec des billes noires.

Toutes les versions sont disponibles en quantités limitées de 100 exemplaires chacune.

D'une Pierre deux Tombes

Meidosem Records & wave Records

D'UNE PIERRE DEUX TOMBES

VerdamMnis Magazine  

Tanz Mitth'Laibach

Septembre 2021

Opéra Multi Steel a toujours été une bizarrerie. Survivant de la new wave française, le groupe fondé en 1983 par Catherine Marie, Franck Lopez et Patrick L. Robin associe depuis toujours la modernité de ses sonorités électroniques à une touche médiévale apportée par les flûtes, les chœurs et le chant en français. Il en résulte une synthpop aux ambiances troubadouresques, entraînante et fascinante, à laquelle se mêle le plaisir du kitsch sur ses clips les plus datés !

C'est donc avec plaisir que l'on voit la formation revenir avec un douzième album. On est d'autant plus curieux que l'on devine que ce disque ne sera pas simplement un album de plus : le premier clip "L'Après-Mort" nous a beaucoup surpris, bien plus sombre que d'ordinaire, et le groupe précise que l'album a été composé après que Catherine Marie, Franck Lopez et Patrick L. Robin aient perdu leurs mères respectives en 2018, d'où le titre : "D'une Pierre Deux Tombes" s'annonçait donc nettement moins enjoué que ses prédécesseurs.

Le douzième opus s'avère toutefois moins triste qu'on ne s'y attendait. Il est vrai que l'album est hanté par des nappes de synthétiseur graves, des chœurs fantomatiques et même de l'orgue sur "Saint-Siège", que le rythme se fige parfois, comme s'il lui fallait retrouver la force de continuer ; l'atmosphère est lourde. Cela est toutefois tempéré par les rythmes dansants, par le chant qui n'a rien perdu de son énergie, la dérision et le cynisme ou la passion suivant les cas paraissant lui donner la force de continuer envers et contre tout, ou encore par les interventions de la flûte, mélancoliques mais douces et vivantes. Ici, il faut continuer à vivre malgré tout, d'une façon ou d'une autre. Le bruit obsédant d'une pendule à coucou à la fin de chaque morceau, succédant parfois à divers extraits de dialogues, nous rappelle tout de même que le temps passe.

On explore ainsi ce nouvel univers musical, dont les morceaux nous enveloppent agréablement pour un moment. Certains nous marquent davantage : c'est le cas de "L'Annonce", entrée en matière dansante à l'énumération pince-sans-rire mêlant "baptême" et "blasphème", mais surtout de "Ainsi de Suite" avec son rythme brisé et sa superposition progressive de couches de synthétiseur oppressantes et d'une flûte pour une fois bien implacable, ou, donc, de "L'Après-Mort" que l'on connaissait déjà. Celui-ci est finalement le seul morceau véritablement lugubre de l'album : le chant se brise, les paroles sont amères, le morceau reste figé sur une nappe grave et rugueuse, la boîte à rythme erre sans but. Il faut bien dire que, malgré le nombre de fois que nous avons déjà écouté cette chanson avant la sortie de l'album, elle ne rate jamais son effet, triste et qui pourtant suscite en nous une étrange affection. L'album s'achève sur une citation du Nom de la Rose avant que le coucou ne revienne pour sonner dans le vide, à jamais.

D'une Pierre deux Tombes

Meidosem Records & wave Records

D'UNE PIERRE DEUX TOMBES

Obsküre

Emmanuël Hennequin

Juin 2021

Le douzième (oui, vous avez bien lu) album d'Opéra Multi Steel s'intitule "D’une Pierre deux Tombes" et sort chez Meidosem Records / Wave Records. Le groupe retrouve à l'occasion une configuration trio, ce qui ramène au temps de ses origines. Retrouvez donc aujourd'hui aux commandes les personnes de Patrick L. Robin, Franck Lopez et Catherine Marie.

À divers titres, cette sortie se distingue. Tout d'abord, "D'une Pierre deux Tombes" sort en deux formats différents dont les tracklists différeront assez substantiellement puisque le format CD comprendra quatre morceaux de plus que le format vinyle. Et puis il y a une spécificité, autant par le fond que dans la forme. La communication mise en œuvre autour de la sortie parle d'une conservation de l'esprit et du son, et souligne une tristesse et une nostalgie sans doute plus présentes. Il y a là récurrence des thèmes de la mort et de la vanité ("Cimeterre", "L’Après-Mort"), quand les sons de cordes et la présence de rythmiques programmées peuvent évoquer la futurepop et renforcent le côté tragique du propos ("L’Annonce", "La Nuit des Doutes", "Intercession").

Le contexte est la donnée de fond. C'est un moment de gravité dans le parcours des musiciens d'origine. Le disque s'inscrit dans une période et une atmosphère de deuil, et prend une dimension d’hommage posthume : les trois musiciens, il y a trois ans, ont perdu leurs mères respectives, et le disque offre à sa manière le témoignage d'un vécu et de ces moments tant redoutés.

Une ornementation sonore supplémentaire apparaît dans la version CD. Initiative originale dont la symbolique n'échappera à personne : chaque chanson y est ponctuée par le son du vieux coucou qui restait seul sur les murs de la maison vide de la mère de Patrick et Franck après sa disparition comme le témoin d’une présence persistante, marquant les heures au-delà d’une existence défunte. Un petit écrin de mémoire se forme ici aussi par l'inclusion à l'enregistrement du dernier message vocal qu'a adressé sa mère à Patrick.

La pochette est signée Hernan Czauski, lequel a utilisé des clichés pris par les membres du groupe dans plusieurs anciens cimetières français (Caen, Paris), présente des détails de tombeaux sculptés du XIXème siècle qui évoquent à la fois le silence du tombeau, la fidélité au-delà de la mort et le chagrin éternel.

Stella obscura

Wave Records

STELLA OBSCURA Réédition

Guts of Darkness

Shelleyan

Janvier 2022

"Heu, y'a un rapport avec Star Wars ?" "Crétin !". Quoique, allez savoir, avec ces petits farceurs de Opéra Multi Steel et leurs clins d’oeil perpétuels entre époque médiévale et contemporaine mais je préfère ne pas envisager si vile référence par convenance personnelle. Ce disque, le cinquième mais second et dernier avec le percussionniste Jean-Marc Bougain, se distingue notamment par un jeu de percussions travaillé en subtilité discrète afin de suivre et amplifier la musique sans la dominer. D’emblée, le combo propose les deux faces de son travail, celle que j’adore, mystique, baroque, incarné par ‘Benedictus’, celle que je goûte moins, toute aussi décalée mais plus pop, avec "Spacio Astro" (j’avais d’ailleurs eu un peu de peine avec l’essai précédent "Les Douleurs de l’Ennui" à l’époque) dont les polyphonies annoncent déjà trop "O Quam Tristis..." à mon sens; s’y ajoute même une touche plus new wave cold, ainsi sur le bon "Mieux les hommes vivent" ou le quasi hit "Grégoire". C’est le souci de cette galette qui tire un peu dans toutes les directions, avec des morceaux certes plutôt efficaces, beaucoup d’allusions contemporaines, des mélodies solides, des petites touches marrantes avec des samples bien placés, usage du français, du latin, de l’anglais pour les textes. Un aspect typique de l’identité du groupe, me direz-vous et vous aurez raison, c’est juste que je le trouve mieux géré sur d’autres opus ou alors c’est simplement que certains morceaux auraient pu être zappés ("Spacio Astro", "Tes Lèvres, un Abat-son" dont le chant féminin me gène un brin) ? Je cherche sans doute la petite bête car Stella Obscura propose des compositions vraiment solides et fortes: "Les Prophètes", le délicieux "Memorias de Vigo" aux influences orientales, "Grégoire" "Benedictus"… Paradoxalement, il sonne plus assuré, moins léger que son prédécesseur, plus voilé d’inquiétude également. Rien d’étonnant quand on sait que Patrick L.Robin sombrera dans la dépression peu après, d’ailleurs le Opéra Multi Steel réactivé conservera dorénavant cette goutte sombre dans sa musique. Stella Obscura, pas pour rien. A noter que cette réédition expurgée par le label brésilien Wave Records propose une version offrant en bonus le cd d’origine et sa tracklist complète.

Stella obscura

Wave Records

STELLA OBSCURA Réédition

Side-Line

Inferno Sound Diaries

Janvier 2019

Stella Obscura est le quatrième album du groupe français "culte" Opéra Multi Steel. La version originale, sortie en 1992 sur le propre label du groupe, Orcadia Machina, comportait dix-sept chansons. Cette version vinyle sous une nouvelle pochette ne contient que neuf chansons de la tracklist originale bien qu'il existe une édition limitée sur disque couleur argent livrée avec un CD bonus où vous pouvez écouter toutes les chansons.

L'œuvre est typique du son unique unique d'OMS. Le style apparaît rapidement comme un croisement entre différentes influences, que l'on peut facilement résumer en gothique, new/dark-wave et folk. L'écriture des chansons est sophistiquée et toujours délicate  toujours imprégnée d'une influence de la fin des années 80. Les chansons sont chantées en français (à l'exception d'un titre chanté en langue latine). La dernière chanson "Memorias De Vigo" , marquée d'influences orientales, est un peu moins typique du groupe.

Opéra Multi Steel est synonyme de douce mélancolie et de poésie noire. C'est exactement l'objet de ce travail. Cet album fait revivre la sphère intime créée par le groupe,  délicieuse fusion entre électronique et instruments authentiques. C'est une oeuvre intelligente révélant quelques-uns des plus beaux morceaux du groupe. Le déjà mentionné "Memorias De Vigo" reste un vrai grand titre.

Les chansons sont assez similaires bien que révélant ce son typique qui a fait la renommée du groupe. Il est étrange d'avoir un format vinyle avec seulement neuf titres. Un double vinyle aurait peut-être été une meilleure idée.

Ce disque vous fera voyager dans le temps. C'est définitivement un objet de collection pour la fanbase du groupe.


Meilleurs titres : "Memorias De Vigo", "Spacio Astro", "Tes Lèvres, Un Abat-Son", "Les Martyrs ".

Réminiscences

Wave Records

REMINISCENCES

Twice n°65

Clément Marchal

Février 2018

Ne cherchons pas pourquoi mais c’est encore le label brésilien Wave Records (qui fête ses dix ans) qui sort les disques d’Opéra Multi Steel et qui se fait plaisir … et par la même occasion aux fans de l’infatigable quatuor de la région de Bourges. Ici pas de nouvel album mais une collection de huit titres retravaillés et sérieusement « reboostés », issus de "Cathédrale" (1985), "A Contresens" (1988), "Les Douleurs de l’Ennui" (1990), "La Légende dorée"(2011). On retiendra en particulier "Fureur en Asie" qui reçoit un lifting très New Order et Collection d’Arnell-Andréa… et nos morceaux fétiches que sont les toujours aussi incroyables, baroques et psychédéliques "Cathédrale" (avec une tournure électro dark allemande très 90’s et "Du Son des Cloches" flirtant avec les atmosphères de Qntal. Un exercice réussi, une véritable récréation et surtout une nouvelle mise en valeur de titres qui valaient déjà leur pesant d’or à leur sortie… Mention spéciale à "Un Froid seul" complètement réorchestré, terrifiant et sidérant. Et si je vous dis que cette nouvelle collection se retrouve en version picture-disc édition limitée… Je ne dirai plus jamais non, je n’aurai plus jamais froid…

Apparences de l'invisible

Meidosem Records

APPARENCES DE L’INVISIBLE

Side-Line

Elise Din

Décembre 2015

Opera Multi Steel est l'un des vétérans de l'histoire de la musique new-wave et gothique française. Le groupe est actif depuis le début des années 80 et a acquis une reconnaissance internationale. Leurs  travaux initiaux ont été auto-publiés (Orcadia Machina) tandis que leurs travaux ultérieurs ont été publiés par des labels comme Triton et Wave Records. Ils ont rejoint le label français Meidosem Records pour sortir ce vinyle  il y a quelques mois maintenant.


Le style et les influences du groupe sont restés en gros les mêmes par rapport à  leur première période. Opera Multi Steel évolue clairement dans un style "rétro" qui me rappelle l'esprit des années 80 bien qu'ils n'aient jamais été un groupe 'typique' du genre new-wave.


Apparences de l'Invisible confirme cette approche différente,  assemblant soigneusement différentes idées pour réaliser un mix intéressant de  new-wave et d'éthéreal. Cela ressemble  un peu parfois  à la musique de troubadours modernes.


Les chansons sonnent comme une délicate caresse sonore. Ceci transparaît principalement sur « A l'extrême Veille d'un Novembre imminent ».  Le choix de chanter dans leur langue maternelle est un autre élément primordial d'Opéra Multi Steel. Ce vinyle contient un total de 8 chansons,  autre clin d'œil aux bonnes vieilles années 80 et au format vinyle.


 « Apparences de l'Invisible » est un album sans réelles surprises, mais qui colle totalement au style de ce groupe mythique. Ce n'est pas mon album préféré, sans doute à cause de l'absence totale d'innovation et au manque de hits potentiels.


Meilleures chansons :« A l'extrême Veille d'un Novembre imminent », « Ad Nauseam ».

Apparences de l'Invisible + Au Fief des Rémanences

Meidosem Records

APPARENCES DE L'INVISIBLE + AU FIEF DES RÉMANENCES

Side-Line

Inferno Sound Diaries

Janvier 2019

Ce double album comprend une réédition d' Apparences de l'Invisible  sorti à l'origine en 2014 ( précédent album en studio d'OMS) et le nouvel opus Au Fief des Rémanences . Notons au passage que le nouvel album est également disponible en vinyle.


Il y a peu à dire sur  Apparences de l'Invisible  qui  reste une œuvre typique d'OMS  inclinant vers la chanson française . Les paroles sont poétiques et traitent de thèmes introspectifs. La musique est sombre et onirique.


Le nouvel album Au Fief des Rémanences révèle un groupe en pleine forme. Le son a évolué au fil des ans, devenant plus mélodique et électro, mais toujours fidèle à ses origines. On y retrouve encore cette harmonie artistique entre structures électroniques et instruments authentiques.


Je ne peux pas dire que les membres d'OMS aient réinventé leur spectre sonore, mais ils ont clairement évolué et délivrent ici une oeuvre plus électro-mélodique que jamais. J'aime l'alternance entre les passages électro et les parties d'inspiration folk-goth. Parfois une simple "chanson" peut basculer dans la pure rêverie. Cet album est un véritable accomplissement pour un groupe dont l'approche du son et de la composition demeurent uniques .

J'ai toujours trouvé qu'il manquait un peu de passion dans leur manière de chanter, mais à contrario cela contribue à accentuer le contenu lyrique. OMS aime la poésie, et joue avec l'esthétique des mots et des phrases d'où un style parfois un peu pompeux.


Opéra Multi Steel ne semble pas vraiment affecté par le poids du temps et encore moins par le manque d'inspiration. Ces deux albums réunis révèlent un groupe qui a su évoluer avec le temps tout en conservant son originalité.


Meilleurs titres :  « Mirage Fatidique », « Infini Sidéral », « Plus qu'Imparfait du Suggestif », « Le Coup de Grâce », « L'Emotionnel », « Les Litanies ».

Apparences de l'Invisible

Meisosem Records

APPARENCES DE L’INVISIBLE

Guts of Darkness

Shelleyan

Aout 2023

Il existe en la ville de Lausanne, Suisse, une statue équestre du général Henri Guisan qui fut nommé commandant en chef de l’armée du pays durant la Seconde Guerre mondiale. Extrêmement populaire, il demeure un symbole d’une Helvétie neutre idéalisée, apte à résister à l’Allemagne, aux yeux des citoyens patriotes neuneus et des nostalgiques. Quelqu’un remarquait que des archéologues la découvrant dans 500 ans pourraient en tirer de drôles de conclusions puisque le soldat chevauche sa monture à cru. Ces mêmes chercheurs pourraient être surpris par la musique de Opéra Multi Steel. Comment interpréter ces morceaux mêlant boîte à rythmes, synthés, harmonies médiévales et paroles étranges ? Un groupe actif en tout cas qui, surtout depuis 2010, pond des disques avec une régularité déconcertante. Que dire de Apparences de l’invisible ? C’est de l’Opéra Multi Steel pur jus soit une cold wave/new wave à l’ancienne fortement teintée d’une aura médiévale : boîte à rythmes sèche, flutiaux en délire, basse, claviers et un chant se structurant presque comme une version pop du chant grégorien… C’est connu. Trop peut-être ? Attention, c’est un disque honnête, soigneusement écrit et produit, avec quelques jolies trouvailles tels que certains passages de chant féminin ("Mirage fatidique"), un emploi malin des samples, un zeste d’expérimentation dans les sonorités de la boîte. OMS maîtrise à la perfection sa new wave liturgique mais pour qui connait bien la carrière du groupe, ce n’est pas l’opus le plus prenant, voilà tout. Les ambiances sont impeccables, l’interprétation de même, avec des orchestrations parfois très belles (la guitare de "La voix des Défunts", par exemple) mais selon mes goûts (et Satan sait que c’est subjectif), Opéra Multi Steel a proposé mieux, plus surprenant ; moins bien aussi, donc aucune raison de ne pas se frotter à Apparences de l’invisible. On dira simplement que les Français ont joué la carte de leur zone de confort, rien de bien grave là-dedans.

Mélancolie en prose

Wave Records

MELANCOLIE EN PROSE

Guts of Darkness

Shelleyan

Mars 2016

Quel meilleur moment pour vous parler de ce "Mélancolie en prose" qu’un dimanche de Pâques ? Franchement, cette pochette est géniale, des lapins, des oeufs et le Golgotha dans le lointain. Typique de l’humour du groupe, de même que l’introduction de certains morceaux par des extraits d’un ancien manuel expliquant à l’auditeur comment bénéficier au mieux des qualités de sa chaîne hi-fi…Toujours cette touche rétro chère aux musiciens. Et le disque lui-même, qu’en est-il ? Pas 100 % nouveau puisque Opéra Multi Steel revisite six anciens morceaux jamais sortis sur cd auxquels s’ajoutent six nouvelles compositions; le tout est cependant arrangé de manière très homogène et de toute façon, le son des Français n’a jamais réellement varié depuis les débuts. "Mélancolie en prose" ne déroge donc nullement à la tradition d’écriture new wave synthétique habituelle. Il est assez extraordinaire de constater qu’avec une telle formule, le combo parvient à se renouveler et nous proposer à chaque fois de nouvelles choses intéressantes. Sur une base de synthés old school, de boîtes à rythmes, les musiciens ajoutent divers samples de films, choeurs religieux, de même que quelques instruments acoustiques (flûte, tambourin). Mystique, atypique, mêlant passé et présent, leur new wave charme par ses mélodies douces amères, ses climats particuliers, ainsi que par le chant porté en écho de Franck Lopez et Patrick L.Robin (les textes sont toujours aussi sibyllins et spéciaux). Beaucoup de bons moments: l’excellent "Mauvais oeil", "Physionomie" (un hommage à Frank Herbert), "Eternelle tourmente", "Un lac ou une journée" sans oublier "Et par delà les blés" avec des paroles écrites par Jean-Christophe d’Arnell (Collection d’Arnell-Andrea). Opéra Multi Steel se rit des modes, suit son propre parcours qu’il ne cesse d’enrichir, d’affiner, sans dévier de sa philosophie de base. "Mélancolie en prose" ne faillit pas, il s’agit même d’un des très bons albums de la discographie du groupe.

Histoires de France

Museum Obscuro / Cri du Chat

HISTOIRES DE FRANCE Réédition

Guts of Darkness

Shelleyan

Mars 2012

Pourquoi s'intéresse-t-on à l'histoire, surtout lorsque l'on est enfant ? J'ignore pour vous mais personnellement, ces leçons-là avaient quelque chose d'une invitation au rêve. Bien entendu, j'ai vécu également le cliché des dates à apprendre mais si l'on fait abstraction de ces paramètres désagréables, ne vous êtes-vous jamais enthousiasmés en imaginant la vie au temps des pharaons, la flamboyance de l'Empire Romain ? Et que dire du Moyen Age ? La vision des chevaliers en armures chargeant sur les champs de bataille, les donjons de pierre, les moines copiant les manuscrits... A cet âge-là, le pouvoir de l'iconographie est essentiel et visiblement, les musiciens d'Opera Multi Steel ont eux-aussi été marqués par les images de leurs manuels. Eux qui ont toujours été fascinés par un Moyen Age fantasmé, sublimé, plus proche de l'imaginaire que de la réalité historique, ont souhaité donner à cette réédition de leur cinquième disque l'apparence des vieux ouvrages en reprenant cette iconographie typique. J'adore. De même que le disque lui-même. Mon histoire avec Opera Multi Steel avait mal démarré lorsqu'en 1990, j'avais découvert "Les Douleurs de l'Ennui", je n'étais pas prêt pour cette espèce de cold wave médiévale et surréaliste. Depuis que je me suis repenché sur la question, je suis accro ; il y a quelque chose d'irrésistiblement envoûtant dans ces mélodies pop mêlant orgues et boîtes à rythmes, basse, synthés et instruments acoustiques. Et que dire de ces paroles hermétiques, entre écriture spontanée, fascination des rimes anciennes, non-sens et surréalisme ? Bien que sorti en 1996, les sonorités de "Histoires de France" renouent avec l'esprit de "Cathédrale", ce qui n'a rien d'étonnant puisque le matériel utilisé est constitué de bandes rares extraites de démos ou de cassettes limitées enregistrées par le groupe entre 1985 et 1987. D'abord destiné au public brésilien très friand de nos Français, "Histoires de France" est aujourd'hui disponible grâce aux bons soins de Infrastition en une édition double cd proposant le disque lui-même ainsi que les versions originales. Pour user d'un langage moderne, c'est une usine à tubes, "Tout s'oublie vite", "Quatre Ecclésiastes", "Ecran couleur", "Poursuis une Ombre", "Des Saints et des Miracles3 ou encore "Moi, je m'ennuie" sont irrésistibles mélodiquement et l'idée de ponctuer la progression des chansons par des résumés de cours d'histoire lus d'une voix hésitante par des enfants colle parfaitement à cette démarche du pastiche du manuel d'histoire. Il est également intéressant de comparer la progression par rapport aux enregistrements de base, souvent bruts capturés en deux ou quatre pistes, avec quelques surprises comme la cornemuse de "Quatre ecclésiastes" que les musiciens n'ont pu, à leur grand regret, reproduire, la remplaçant par une ligne de synthé. Des compositions telles que "Un cri", "Tant pis" ou "Regrets qui s'écaillent" ont subi un remodelage plus important mais globalement la philosophie a été de reprendre les bases et de les porter aussi loin que possible. Le résultat est des plus probants. A défaut de vous plonger dans la nostalgie de vos anciens cours d'histoire, "Histoires de France" mérite tout votre intérêt.

La Légende Dorée

Wave Records

LA LEGENDE DOREE

Obsküre n° 1

Max Lachaud

Nov-Déc 2010

Depuis "Une Idylle en péril", on pensait qu’Opéra Multi Steel avait arrêté toute activité pour se concentrer sur d’autres projets. Que nenni, les voici plus en forme que jamais, et ils ont ramené leur matériel analogique avec eux. Boîtes à rythmes, synthés cheap, Casio, basse cold, instruments acoustiques (flûtes, mélodica, tambourin, guitare…), les chantres de l’électro-pop à la française manient toujours avec autant de dextérité minimalisme poétique, imaginaire médiéval, religieux et enfantin, collages incongrus et textes énigmatiques. La reverb est à fond, les vibratos maîtrisés, le delay jubile, tandis que les rythmiques semblent sorties tout droit des années quatre-vingts, comme issues des sessions d’enregistrement de leur premier opus, "Cathédrale" (1985). Par ses mélodies entêtantes, son humour et son sens du baroque, qui ne craint aucune emphase, OMS séduit et irrite, mais force est de constater qu’il s’agit ici d’un des meilleurs albums de toute leur carrière, à ranger à côté d’ "Eternelle Tourmente" (1999). "Fureur en Asie", "Karma sous trame", et surtout les deux derniers morceaux, "NS-ND" (imparable pour le dancefloor, avec son déhanché corbeau, entêtant et profondément émotionnel) et "Un Art fatal" (froid et mystique à souhait, avec ses chants grégoriens), sont autant de tubes qui raviront tous les fans. Parce que le noir c’est cool et que la mort vous va si bien, crêpez-vous les cheveux et ressuscitez les suicidés avec OMS ! Jusqu’au bout de la nuit…

La Légende Dorée

Wave Records

LA LEGENDE DOREE

Trinity

Stanislas Chapel

Silencieux depuis les antiennes froides et frémissantes d'une "Idylle en Péril", Opéra Multi Steel n'a cessé de hanter, durant ces années de silence, les corridors réanimés des musiques wave. A l'instar d'autres figures de la minimal wave 80's, les années 00's auront été pour le groupe d'Avaricum celles d'une résurrection. De compilations ("Transmission", "Movement One", "RVB", "Ruines & Vanités", "Wave Klassix", "Cold Wave + Minimal Electronics"...) en rééditions ("Cathédrale"), de réapparition (une reprise d'"Isolation" sur l'hommage à Joy Division "30 Years With(out) Ian Curtis Transmission 80_10") en variation d'identité...

Opéra Multi Steel renaît de ses cendres, immaculé dans la froidure synthétique ascensionnelle, entrelacs de voix, le verbe miroitant qui file à la barbe du sens.

Jeunesse éternelle de territoires caressés par la vague froide, pulsation idéale de la basse de "Karma sous Trame" à "Détention", magie mécanique de rythmes du "Rite Sacré" à "Sainte So", à l'image du dernier titre, le quatuor nous délivre "Un Art Fatal"!

"La Légende Dorée" parade sonore, mélancolique offrande aux martyrs antiques d'un Opera Multi Steel lumineux et maître de son indescriptible mystique aux fruits insensés.

Philtre alchimique et éternelle jouvence nourrissent ce huitième album, réminiscence des fastes synthétiques des débuts mais offrant quelque chose de fondamentalement -autre-.

La Légende Dorée

Wave Records

LA LEGENDE DOREE

Trinity

Céline Olivier

2011

Avec le temps, tout s'en va... Les sorciers du Berry ont fait mentir l'adage avec "La Légende Dorée". C'est avec ravissement que l'oreille plonge dans ces volutes synthétiques tant aimées soutenues par une basse toujours diabolique.

Dès la première écoute, l'album se révèle une mine de titres imparables: de "Karma sous trame", un classique instantané à "Fureur en Asie" à la mélancolie voilée en passant par "Rite sacré" au charme à la fois rampant et ascensionnel. Les volutes néo-médiévales du melodica s'enroulent autour des sons majestueux de l'Elex-tchèque en une sarabande infinie. Avec le temps, le chant s'est fait moins dolent et envoûte l'auditeur qui voyage de Byzance en Asie.

Dansez frères humains, le crépuscule des dieux n'est pas pour demain!

La Légende dorée

Wave Records

LA LEGENDE DOREE

Guts of Darkness

Richard

Février 2017

Retour gagnant pour Opéra Multi Steel avec ce très bon album. C’est certain, après une écoute rapide, on pourrait reprocher à OMS de toujours faire du OMS, encore et encore. Pourquoi pas…mais à vrai dire, le quatuor cisèle son monde atypique avec une telle aisance et un tel plaisir qu'il serait bien dommage de s’en priver. J’y retrouve avec la même délectation cette synthpop hautement perchée au sens toujours aussi abscons (les géniaux "Vision Holistique" ou "Rite Sacré"). Un univers faussement enfantin qui se nourrit d’un imaginaire incertain. L’essence même de ce groupe à vrai dire et tout son intérêt .

La Légende dorée

Wave Records

LA LEGENDE DOREE

Guts of Darkness

Shelleyan

Mars 2011

Il eût été logique de suivre une certaine chronologie et de chroniquer en premier la réédition de "Cathédrale" qui concerne les débuts du groupe (et cela sera fait un jour prochain) mais j'avoue que la curiosité l'a emporté à l'annonce de la sortie de cette "Légende dorée". Que pouvait donc proposer Opéra Multi Steel près de vingt-six ans après leur premier essai ? D'autant que ces dernières années avaient vu la priorité accordée aux side-projects ("O Quam Tristis", Three Cold Men)... Constat : ce disque est bon, peut-être même le plus proche philosophiquement de "Cathédrale" justement puisqu'on y retrouve le mélange de minimal wave synthétique et de mysticisme catholique, traité sous la loupe d'un humour bien personnel sur lequel le groupe a établi ses bases. Certains déploreront peut-être que les musiciens n'aient pas cherché à moderniser leurs sonorités en usant de boîtes et de claviers au rendu très 80's mais pas moi; Opéra Multi Steel confirme sa sincérité et sa position atypique hors de toutes mode, fidèle à une démarche explorée sous tous les aspects possibles en se servant d'une expérience acquise au fil de toutes ces années. Si les compositions conservent une forme de spontanéité pop au travers de structures également influencées par les orchestrations médiévales, on sent un travail intelligent dans la production, une fluidité dans l'écoulement de l'album et une forme de spiritualité trouble plus maîtrisée que jamais, tant dans la musique que le chant perdu au coeur des réverbérations. Certains (dont moi au début) ont reproché à Frank Lopez un chant trop léger, une version sombre de Etienne Daho, mais comment imaginer d'autres intonations ? C'est justement cette fraîcheur pop qui évite au projet de tomber dans la caricature, permettant à Opéra Multi Steel ces textes sybillins baignés d'érudition religieuse ("La Légende Dorée" étant un ouvrage traitant de la vie de martyres chrétiens canonisés rédigé entre 1261 et 1266 par Jacques de Voragine) servis dans un habillage cold wave synthétique. Si l'album fonctionne merveilleusement comme un tout, je peine davantage à en extraire un ou deux morceaux particuliers plus fort émotionnellement ou mélodiquement (encore que "Karma sous trame", "NS-ND" ou "Au sein de l'Essence-même" se dégagent aisément)...Peut-on classer ça comme un défaut ? Faut pas pousser tout de même, le talent est intact. 

La Légende Dorée

Wave Records

LA LEGENDE DOREE

Obsküre

Rosariüs

On n’osait même plus l’attendre ! Mais il est pourtant bien là, le nouvel album d’Opéra Multi Steel, pas moins de sept ans après "Une Idylle en Péril". Projet incontestablement unique dans le paysage cold wave français, le quatuor profite de son retour studio pour re-confirmer ses singularités, tant musicales que thématiques, et les amateurs de mysticisme catholique ambigu sur fond de Wave froide et synthétique ostensiblement eighties en pleureront de joie : chants résonnants, chœurs étranges, nappes atmosphériques religieuses, instruments médiévaux, basses rondes ou claquantes, percussions froides, tous les ingrédients sont là, et le groupe réussit encore une fois à créer des friandises surannées. Le sens de la Pop, revendiqué depuis le premier essai "Cathédrale" (1985 !), est toujours aussi prégnant ; les qualités mélodiques, pétries dans ce savoir-faire cold wave si particulier, assurent à des titres comme "Karma sous Trame", "Perdre Connaissance" ou "Ns-Nd", pour ne citer qu’eux, un impact maximal : les sons s’articulent dans l’écho, la sensation de profondeur est presque étourdissante, et le verbe sibyllin de Patrick Lopez, perdu dans des réverbérations religieuses donne à ces étranges pop songs une couleur unique. Plus synthétique que son prédécesseur – presque dépourvu de guitares, en fait –, "La Légende Dorée" semble aussi, musicalement, moins gouailleur. La froideur, la tristesse et l’ironie se mélangent, et l’humour qui déconstruisait savamment la mystique d’albums comme "Cathédrale" ou "A Contresens" est bien plus circonspect. L’œuvre de Jacques de Voragine, "La Légende Dorée", qui retrace les vies et martyres de chrétiens canonisés – Sainte Anastasie, Saint Jean l’Aumônier, Chrysostome… –, offre à l’album une force visuelle et thématique forte, une noirceur brumeuse et paradoxalement hyaline : Opéra Multi Steel jongle une nouvelle fois avec les codes, et son érudition lui permet d’assumer parfaitement l’ambiguïté avec laquelle il traite de ces thèmes sulpiciens. Il fait plaisir de retrouver, sur LP, un projet musical qui marqua les grandes années cold wave françaises, qui fit son propre chemin dans ses influences new wave, heavenly, pop et expérimentales, et qui joua brillamment avec les topoï visuels et musicaux du catholicisme, et des traditions populaires médiévales et folkloriques. Les Berruyers sont aujourd’hui résolus à réhabiliter la succulente froideur des sonorités eighties, et s’arment de leur revendication synthétique pour imposer un album fort bien tissé, dont la thématique ambivalente trouve une réponse dans les vapeurs gelées d’une musique aussi obscure que pop. Les nostalgiques de la Cold française peuvent y aller les yeux fermés, et les nouveaux amateurs de musiques sombres et expérimentales trouveront sans doute dans "La Légende Dorée" un acte jamais entendu, et l’impulsion pour découvrir les secrets d’une très riche discographie.

Excellent ! 

La Légende Dorée

Wave Records

LA LEGENDE DOREE

Elegy n° 66

Sabine Moreau

Janv-Fév 2011

Peu de temps après la sortie, il y a deux ans, de la rétrospective "Parachèvement de l’Esquisse" qui devait marquer un point final à l’activité d’Opéra Multi Steel, des rumeurs concernant la mise en route d’un album inédit ont commencé à circuler, rumeurs fondées puisque aujourd’hui le groupe culte nous revient nimbé de sa "Légende Dorée". Et c’est une chance pour tous les amateurs de cette cold littéraire aux accents médiévaux car OMS est clairement au mieux de sa forme et de son inspiration, comme le prouve ce recueil de morceaux très marqués par la thématique des martyrs, anciens et contemporains et traitant de sujets aussi fondamentaux que l’enfermement physique et moral ou encore l’ignorance et la quête/transmission de la connaissance. Sur le plan musical, le groupe renoue avec une approche plus électronique en faisant la part belle aux claviers et boîtes à rythmes de ses débuts et pratique avec une délectation marquée l’art du sampling créatif. Inutile de tenter de résister à l’attraction provoquée par cette "Légende Dorée", plongez-y plutôt corps et âme.

La Légende dorée

Wave Records

LA LEGENDE DOREE

Discogs

Anna Logue

Novembre 2010

Franchement, je n'ai pas suivi la carrière d'Opéra Multi Steel  au cours des  dernières années, mais je connais leurs premiers travaux. Alors qu'ils n'avaient rien publié de nouveau depuis huit ans, les voilà qui  reviennent avec "La Légende dorée", sorti sur le label brésilien Wave Records. Il est clair qu'Opéra Multi Steel est revenu à ses racines: 

-La Roland TR-808 est la boîte à rythmes principale sur neuf des 12 pistes.

-La Roland TR-909 sur les trois restantes (sinon les deux sont utilisées sur une même piste, la première "Karma sous Trame" qui pourrait aussi être l'un des derniers morceaux de Guerre Froide).

-Le Casio VL-1 est présent sur  chaque piste et contribue largement au son typique d'Opéra Multi Steel.
Et tout ceci  fait la différence ! 

Certains peuvent penser que vouloir vivre dans le passé est criticable. Je suis en partie d'accord avec cela, mais la musique et le son du début des années 80 étaient simplement honnêtes et conséquents. Il ne s'agit pas là de  vivre dans le passé, mais plutôt de vivre avec. Tout l'album est magnifique, mais quelques grands tubes méritent une mention spéciale : "Détention" qui me rappelle  un peu  le merveilleux instrumental "Dreamstreet" de Psyché alors que le refrain est typique OMS. "Le Cachot", "Au sein de l'Essence-même", "Homélie mélodique" et surtout "NS–ND ” sont des morceaux classiques du groupe et des succès potentiels en live et en discothèque. Ces DJs qui jouent la même merde encore et encore, devraient les diffuser. 

Opéra Multi Steel  est donc de retour  comme nous l' avons toujours aimé !

Le CD bonus comprend quatre remixes de "Vision Holistique“, "Perdre Connaissance“, "Fureur en Asie“ et "Karma sous Trame“ réalisés par les membres du groupe, accompagnés de quatre cartes collectors illustrées avec textes et crédits des chansons.

La Légende Dorée

Wave Records

LA LEGENDE DOREE

Side-Line

Xavier

Février 2011

Décidement, Opéra Multi Steel n’a rien perdu de son esprit provocateur. En choisissant "La Légende Dorée" comme titre d’album, en référence au livre de Jacques de Voragine, le groupe ne manque pas de s’amuser une nouvelle fois des croyances. Mais n’y voyez aucune forme d’hérésie ou de blasphème. Opéra Multi Steel détourne les textes comme les images pour créer un monde musical et visuel fort étrange et décalé. A vous de savoir lire entre les lignes pour tenter de comprendre exactement quel est le sens des paroles parfois obscures des chansons ("Perdre Connaissance"). Vous allez pouvoir vous perdre dans un véritable labyrinthe de significations possibles. Mais sachez que la meilleure interprétation est celle qui vous sera personnelle.

Musicalement, vous aurez l’impression d’avoir voyagé dans le temps pour repartir dans les années 80. Cela a été rendu possible grâce à l’utilisation de vieux instruments que le groupe a ressortis pour l’occasion (Roland TR606, TR 808), le tout soutenu par un son de basse particulièrement mis en avant. Mais OMS ne s’est pas arrêté là, vous avez de nombreux effets sur la voix et quelques samples également, qui contribuent à créer une ambiance encore plus prenante sur certains morceaux ("Vision Holistique").

Le plus surprenant, c’est que tout en ayant ce son old-school minimaliste, le groupe profite de la qualité de la technologie actuelle. Ainsi, tout en ayant ce côté un peu kitsch, le son est très propre et soigné. OMS n’a rien laissé au hasard et chaque mélodie est là pour faire mouche. Si le clap électronique si caractéristique des boîtes à rythme des 80’s est bien présent, il ne sonne pas complètement synthétique et ridicule comme à l’époque ("Fureur en Asie"). Au contraire, il s’intègre à merveille et l’on en vient à se demander comment il pourrait en être autrement. Mais surtout l’album n’est pas qu’une version re-sucée d’il y a vingt-cinq ans. Car vous avez de nombreux petits effets étranges qui donnent une couleur toute particulière à chaque morceau.. Est-ce l’influence des autres formations dans lesquels officient certains membres (Three Cold Men, « O Quam Tristis… » Collection d’Arnell Andréa) ? Toujours est-il que tout est fait pour vous offrir une ambiance plaisante, entre le souvenir et la surprenante nouveauté ("Le Cachot").

Finalement, "La Légende Dorée" est une sorte d’ovni qui ressortirait du passé, en ayant conservé le meilleur de cette époque pour pouvoir s’adapter à nos oreilles des années 2010. Et vous allez vraiment vous surprendre à avoir un petit coup de nostalgie une fois la dernière piste arrivée à son terme.

Et comme OMS ne fait pas les choses à moitié, "La Légende Dorée" est également un bel objet. Ce superbe digipack reprend des images pieuses détournées. Rien que sur la pochette vous pouvez voir un jeune garçon auréolé dessiner le logo du groupe à l’aide d’une plume. Plume que l’on retrouve ensanglantée sur les illustrations intérieures également, comme sur les images qui sont utilisées sur les petites cartes que vous pourrez admirer dans l’édition limitée. 

Opera Multi Steel a toujours été un groupe à part. "La Légende Dorée" signe leur grand retour. Et d’après ce qu’annonce le groupe dans différentes interviews, un nouvel album serait en préparation. Après tout ne dit-on pas : oldies but goldies ? Ce nouvel album d’OMS après neuf ans d’absence en est un parfait exemple.

La Légende dorée

Wave Records

LA LEGENDE DOREE

Parallèles n°15

Doc Pilot

Décembre 2010

Etrange destin que celui de ce groupe berruyer quasi inconnu sur ses terres mais culte au Brésil où sort ce nouveau disque inédit enregistré en 2010. Il se révèle une synthèse de ce concept dans sa présentation d’un style identifié mais magnifié par l’écriture et les arrangements. On oserait presque le qualifier d’album de la maturité même si ce terme galvaudé reste réducteur et peu enthousiaste. Subtil mélange de tradition gothique et de technologie synthétique, le travail de ce groupe n’a jamais été aussi en phase avec son époque.

L’esthétique religieuse affichée, les chants à l’amplitude grégorienne inspirent le retour d’une époque où l’on créait pour la foi, et même si le propos spirituel s’exprime hors des cultes, l’esthétique inspire un espace « flamboyant ».

Des hommes et des dieux sur le dance-floor.

Parachèvement de l’esquisse

Wave Records

PARACHEVEMENT DE L’ESQUISSE

Guts of Darkness

Shelleyan

Novembre 2010

Mon premier album signé Opéra Multi Steel fut 'Les Douleurs de l'Ennui' acquis en soldes à Paris en 91, je crois... Quatre ou cinq écoutes et je le revendis aussitôt, mon oreille n'étant pas préparée à cette espèce de pop synthétique plutôt cheap ! Près de quinze ans plus tard, me voilà toujours un peu désarçonné face à ce groupe à nul autre pareil mais j'ai réussi à mieux saisir leur philosophie et à y prendre plaisir. Il faut dire que l'approche est plutôt atypique : une pop synthétique minimale mêlée à des textes inspirés par l'Histoire de France, les cathédrales, les chevaliers, la religion, l'art... Si les textes n'ont rien de naïf et regorgent même d'un humour assez personnel limite burlesque ("Massabielle"), il faut quand même s'habituer au chant plutôt léger et à ce parti pris assumé d'une sonorisation très old school, ou moins diplomatiquement dit, un brin cheap...Pour peu que l'on y parvienne, la touche décalée du groupe apparaît assez nettement, l'accroche facile ayant tout d'un leurre laissant croire à une musique innocente à laquelle le pékin moyen aura pourtant du mal à adhérer vu sa texture cold wave médiévale. Pour s'y frotter, pourquoi ne pas tenter cette compilation double cd réalisée par le label brésilien Wave Records retraçant la carrière du groupe de leurs débuts en 1984 à nos jours. Si le premier disque débute avec "Jardin botanique" résumant le son typique de Opéra Multi Steel : boîte très synthétique, orchestrations dépouillées qui sous un habillage new wave empruntent au baroque, voire à la musique médiévale, poésie personnelle et inattendue, c'est véritablement avec "Massabielle" que mon enthousiasme s'est réveillé. Le leurre mentionné précédemment fonctionne à merveille; derrière l'apparente naïveté de la chanson se dissimule en réalité une mélodie addictive, hypnotique, un feeling très particulier, développé en partie par ce chant limite variété qui m'avait tant rebuté la première fois... Originale, la minimal wave des Français se distingue par les influences anciennes des lignes et les textes uniques comme auront vite fait de le confirmer "Cathédrale" (mmm, cette ambiance faussement orientale), "Grégoire", "Forme et réforme", "Si c'est ainsi", "Un froid seul" qui parvient effectivement à faire frissonner, on ne sait pas très bien pourquoi... Peut-être car le groupe maîtrise totalement ses sonorités et que sous l'apparente simplicité, le professionnalisme de la production ne trompe pas ? Le second cd compilant des pièces plus récentes, on découvre une approche plus cold wave mais toujours marquée d' influences anciennes, orientales ("Parfums Esthers")... Les sonorités acoustiques, électriques, se mêlent à l'aspect synthétique de manière encore plus étroite pour plus de mysticisme ("Christ") balayant l'air de rien l'impression de pop marquant les premiers enregistrements. Le chant masculin s'est affermi, quelques touches féminines s'y joignent (influences du side-project "O Quam Tristis..." ?)...Au final, cette compilation se révèle donc un voyage réellement passionnant et si comme moi, vous étiez un peu frileux à l'égard du groupe, elle pourrait bien vous aider à réviser votre jugement...

Cathédrale

Infrastition

CATHEDRALE Réédition Infrastition

Twice n°34

Clément Marchal

Octobre 2007

Relativement sous-estimé et sévèrement underground, Opéra Multi Steel reprend ses lettres de noblesse avec les rééditions du label Infrastition qui dépoussière régulièrement les trésors cachés de la France sombre des eighties. Ce trio a toujours été en marge pour pratiquer ce que j’appellerai de la cold cheap kitsch wave, dans le bon sens des termes tant les titres de cette "Cathédrale" sont originaux et géniaux. Oscillant entre froideur profonde et minimalisme pervers, avec utilisation à outrance de réverb sur le chant de Patrick, toujours à la limite de la rupture, les synthés, boîtes à rythmes, basse et petites bidouilles font la formule magique d’une new wave désabusée et pourtant pas si sombre que ça. Comme si Visage, Talk Talk(« Forme et Reforme »), X Ray Pop (« Piscine à Tokyo »), Cure (« Brasier communiquant », Opéra de Nuit (« Jardin botanique ») ou Lucie cries (« Empire ») avaient laissé au groupe un héritage basique à développer.

Le résultat, vingt-trois ans après la sortie du disque (accompagné ici en bonus des quatre titres du premier Ep du groupe) surprend encore par son avant-gardisme, ses mélopées synthétiques, mélodies médiévales, pop sucrée et darkissimes profondeurs qui nous replongent dans un univers de tons clairs obscurs que les quatre vidéos renforcent encore plus (lesquelles hors-contexte ont super mal vieilli mais qu’on est bien content de découvrir).

Cette "Cathédrale" est royale.

Cathédrale

Infrastition

CATHEDRALE Réédition Infrastition

Obsküre

Sylvaïn

Aborder la réédition du premier album d’Opéra Multi Steel (1985) nécessite du doigté. Le groupe français bénéficie d’une réputation construite sur le long terme et dont les descriptifs flatteurs occultent souvent une grande partie de leur vision musicale.

Avec Opéra Multi Steel, le trio joue sur deux tableaux. A droite, l’hédonisme champêtre (le flûtiau de "Forme Et Reforme") et la face rigolote du groupe. Les paroles flirtent avec un non-sens poétique enfantin et naturaliste ("Brasier Communiquant") et les gigues médiévales rappellent la tradition folk française des années soixante-dix. On peut même frémir à l’écoute d’ "Un Froid seul" tant ce titre exhibe les boursouflures de tout un courant (échos sur la voix, rythme lent). Le second degré contamine une partie des titres. Les clips, heureusement présents sur cette réédition, montrent un groupe de joyeux drilles s’amusant des ambiances morbides qu’ils créent, jouant des clichés bien avant la récupération des Cure par un Tim Pop malicieux. L’introduction de "Frantz est mort" se gausse même de la face sombre du groupe avant que le titre ne déroule sa belle cold wave.

« Belle cold wave » ?

Oui, car à gauche du diptyque se trouvent les expériences concluantes et plus sérieuses. "Massabielle" récupère une bonne part de l’héritage Curesque de "Seventeen Seconds" . "Empire" sonne espagnol, le chant est limpide, les harmonies précises. A l’opposé, "Piscine A Tokyo" se fourvoie dans une proto-electro dance qui, si elle était habituelle à l’époque, n’en a que trop mal vieilli. Recherches synthético-cold-orientaliste à la façon d’un Dali’s Car sur "Cathédrale" (à écouter lors d’une lecture de la Bd d’Andreas,  Le Cimetière des cathédrales ). Le chant de Patrick se colle aux limites du bon goût pendant que Catherine place des chœurs comme des pitreries. Les jeux de mots sont multiples et le travail sur l’écriture est plus que soigné.

Méconnaître cette qualité duelle du groupe, c’est se fourvoyer et risquer de les prendre pour ce qu’ils n’ont jamais été : ni de naïfs rêveurs médiévistes, ni des guignols à la Ludwig Von 88. Subissant la loi d’un discours punk encore très présent, le groupe refusait de se prendre totalement au sérieux. Opéra Multi Steel s’accordait plutôt le rôle du bouffon au sens noble du terme : le groupe lançait des pistes de travail pertinentes qui fusaient sous une trivialité apparente.

A Contresens

Orcadia Machina

A CONTRESENS  Réédition

Trinity

Stanislas Chapel

Août 2001

«A Contresens» est le deuxième album d’Opéra Multi Steel réalisé en 1988 sur support vinyl. Armés d’un nouveau bassiste (Eric Milhiet) qui vient seconder Franck Lopez, le groupe étend la richesse instrumentale de son univers. Le son minimaliste de « Cathédrale» laisse place à des reflets lumineux et célestes. 


L’album pose les jalons d’un style unique, captateur et lyrique, entre fantaisie fiévreuse et prolongation onirique pendant l’éveil. Outre des «tics et attitudes» obliques qui n’ont rien perdu de leur étrange absurdité, que nombre d’auditeurs consommeront avec peine, «A Contresens» possède des titres incandescents comme "Las" ou "Oraisons minimes"  qui renvoient d’éventuelles critiques au rayon des flèches d’indifférence.


Du nectar miscellanéen qui induit une dépendance immédiate.

Eternelle Tourmente

Triton

ETERNELLE TOURMENTE

Trinity N°5

Céline Olivier

Après "Histoires de France" qui a marqué la renaissance du groupe, Opéra Multi Steel nous livre aujourd’hui à une "Eternelle Tourmente". Prenons l’ange déchu de la pochette pour guide et plongeons dans les affres concoctées par le groupe.

Ce dernier a mis du plomb dans son écuelle, en effet, une basse lourde s’impose sur plusieurs morceaux, les rythmes épurés possèdent toujours une simplicité redoutable alliée à une mélancolie insidieuse.

Le chant se partage entre Patrick L.Robin à la voix tantôt sépulcrale, tantôt angélique, Franck Lopez, et Catherine Marie aux cris redoutables. Nouvelle venue sur l’album, Carine Grieg, également clavier du groupe Collection d’Arnell-Andréa, assure les chœurs sur plusieurs titres qu’elle pare de lacis volatiles.

Entre chaque morceau se niche, sous forme de fragments, l’histoire de deux enfants, Maximin et Mélanie, sur fond d’apparition virginale. Ces bribes de conversations sont autant d’éclats lumineux parmi tant de noirceur.

Aux paroles désespérément belles de patrick se mêlent des textes de Rutebeuf, Marie Mareau ou encore le latin du Magnificat. Le sillon autobiographique se creuse toujours ( "Heure Matinale", "Autres Appels"…), les obsessions s’égrènent : incapacité à adhérer à la réalité morne et poisseuse.  " Rentrer à la maison, recouvrer la raison ", à quoi bon ? " Je mourrirai " répond Maximin (et nous avec).

Eternelle Tourmente

Triton

ETERNELLE TOURMENTE

Heimldallr

Stéphane Fivaz

Juin 2000

Nul n'est prophète en son pays, et aucun membre d'Opéra Multi Steel ne viendra démentir ce proverbe.

Suite à l'album "Stella Obscura" paru en 1992, le groupe decida de mettre un terme à sa carrière, étouffée par des problèmes d'ordre personnel et aussi par le manque d'intérêt de la France et de ses maisons de disques. Il est tout de même hallucinant de constater qu'OMS doive sa résurrection à l'enthousiasme du public et des labels brésiliens ! Honte à la francophonie toute entière d'avoir laissé échapper un tel bijou !

Opéra Multi Steel a bâti sa cathédrale de sons au travers d'une discographie sans faute et unique, depuis plus de seize ans déjà, sans jamais trahir l'essence même de leur inspiration. Leur musique est très difficile à classer, étant donné qu'ils sont les seuls maîtres de leur style si particulier, ce qui est tout à leur honneur.

Bien que les racines du groupe soient fortement ancrées dans l'ère Post Punk, Cold-Wave, les compositions sont irrémédiablement imprégnées de leur passion pour le Moyen Age. Et je ne crois pas trop m'avancer en affirmant que leur nouvel album "Eternelle Tourmente" représente leur travail le plus accompli et le plus abouti à ce jour. Les arrangements parfois minimalistes du passé laissent la place à une orchestration fouillée et précise, dont la clarté n'a d'égal que la beauté.

Maximin et Mélanie, deux enfants sujets aux apparitions virginales, servent de fil conducteur aux onze titres présents, introduisant par là même une note naïve et instinctive rafraîchissante ainsi qu'une ironie à peine masquée.

Les quelques personnes encore récalcitrantes aux splendeurs d'OMS devraient trouver ici leur bonheur, et celles déjà acquises aux ritournelles médiévalisantes du combo vont obligatoirement atteindre l'extase.

Et je pèse mes mots ! Cet album est une pure splendeur, de ceux qui resteront dans notre lecteur pour un nombre incalculable d'années, tout comme le "Closer" de Joy Division, le "Aion" de Dead Can Dance, le "Tendercide" de Shock Headed Peters ou le "100 Lives" de Résistance.

"Laudamus te" et son chant en latin empreint de religiosité, " Pauvre Sens et Pauvre Mémoire ", certainement un des sommets de ce disque, sur un texte du poète médiéval Rutebeuf.

La voix de Carine Grieg (Collection d'Arnell Andréa) s'égrène parcimonieusement et avec délicatesse ici et là.

Les textes de Patrick, désespérément beaux, oscillent entre mélancolie vécue et aigreur désillusionnée.

Les titres se tiraillent entre électro-pop, folk, darkwave, la basse plombée contrastant à merveille avec la grâce volatile d'une instrumentation riche, avec en toile de fond cette teinte indélébile moyen âgeuse.

Et toujours ces tics subtils et reconnaissable entre mille (fort écho dans la voix, synthés récalcitrants et lumineux, phrasé inimitable… envoutant ! ! !) Et cerise sur le gâteau, une superbe toile du peintre finlandais Hugo Simberg (1873-1917) en tant que jaquette, à croire qu'elle a été faite spécialement pour eux.

Cathédrale

Orcadia Machina / Cri du chat

CATHEDRALE  Réédition

Trinity N°3

Stanislas Chapel

La réédition du premier album du groupe de Bourges accompagné des titres du premier maxi de 1984, va permettre à la plupart d'entre nous de découvrir les premiers échos synthético-médiévaux , la première forme des brasiers neigeux, des feux froids du groupe le plus singulier de la vieille Europe : Opéra Multi Steel. Résolument opposés et farouchement incapables de se cantonner aux " sons comme il faut ", ils prodiguent dès ce premier album un univers aux textes à couper le souffle et la raison, faits de bris et de couleurs ; une musique à la croisée des inquiétants lochs calédoniens fanfreluchés où se côtoient Sir Nessie et Dame du Lac, et des contrées où nous nous noyons quotidiennement. Si " Un Froid Seul " et " Cathédrale " sont toujours aussi enchanteurs, " Piscine à Tokyo " énerve avec sa rythmique saccadée, tandis que " Massabielle " répand une indicible mélancolie ; ainsi, cet album désarçonnera aussi sûrement que ses successeurs, La musique d'Opéra Multi Steel n'étant pas de celle qui s'offre au passant pressé. En 1984, cette " Cathédrale " s'érigeait sur les ruines encore tièdes d'Orchestral Manoeuvres in the Dark (avant leur déchéance dans la parade des hits synthie-pop), se paraît de lignes de basses ondulantes taillées dans la même roche que The Cure et d'échafaudages synthétiques défiant les lois de la pesanteur. La musique et le chant s'affranchissant de tous les critères, n'obéissant qu'à la règle ultime de l'imaginaire et du fantasque ; offrant aux oreilles des gargouilles sonores à deux visages, à double-face. Du diable au chérubin il n'y a qu'une grimace ; Opéra Multi Steel , si sérieusement excentrique, si bizarrement gothique, a la grâce de ceux qui, tel le loup, refusent l'allégeance.

Le thé est offert dans leur roseraie pour ceux qui feront fi de l'Etiquette, ils en seront amoureusement récompensés par une musique qui n'a pas toujours le visage de son coeur.

Histoires de France

Museum Obscuro / Cri du Chat

HISTOIRES DE FRANCE

Trinity N°2

Aloysius

Iconoclastes invétérés se référant aux aspects fantaisistes, flamboyants et insensés d’un Moyen Age rêvé par les surréalistes, Opéra Multi Steel a persévéré dans une incompréhension quasi générale à construire une cold-wave, devenue par la viduité éphémère des termes génériques : gothique, aux lisières des codes reconnus par tous. Entre écriture automatique, non sens et sonnets elliptiques, Opéra Multi Steel s’est toujours affranchi des lourdeurs emmacabrées, proposant une fraîcheur d’inspiration résolument hostile à toute aliénation.

Disparus après un "Stella Obscura" (1992) contenant quelques uns des plus beaux titres du groupe : "Armide" ou encore "Tes Lèvres , un abat-son", un label brésilien (Museum Obscuro) ayant fait éditer une compilation "Days of Creation" , répondant à un engouement forcené des jeunes gothiques brésiliens, cette même structure nous offre aujourd’hui la possibilité d’entendre un nouvel album du groupe français intitulé "Histoires de France" .

Passé l’émoi dû aux retrouvailles, chaque élément résonne, aussi intemporel qu’hier; le Moyen Age intergalactique d’Opéra Multi Steel défiant tel une cathédrale ceinte de vair les anges aptères des musiques simulant un esprit gothique qui n’est que pacotille comparé à la frénésie céleste de "Regrets qui s’écaillent" ou "Quatre Ecclésiastes".

On ne s’étonnera pas si ce disque comme les précédents ne transperce que les preux qui s’étranglent au moindre son jazzy ou seventies, les humbles qui connaissent encore le goût des larmes versées pour rejoindre l’Alice des rêves, ceux qui n’associent pas une codification intégriste et putréfiante aux ébats sonores qui irriguent la nébuleuse des musiques dark.

Histoires de France

Museum Obscuro / Cri du Chat

HISTOIRES DE FRANCE

PREMONITION N 27

Christophe Labussière

Endeuillés après la sortie du superbe "Stella Obscura", et malgré avoir esquissé un dernier sursaut à la sortie de la compilation "Days of Creation", nous ne pensions plus jamais les voir réapparaître. Mais une passion comme la leur ne pouvait s’éteindre aussi facilement et, ranimés par le label Cri du Chat Disques, ils se sont remis en piste pour nous offrir ce qui est l’album le plus passionnant de leur maintenant longue carrière.

L’énoncé est simple, l’Histoire de France habille ce disque de fond en comble. Son titre, bien entendu, ( agrémenté d’un pluriel à "Histoire"), sa pochette, superbement inspirée de vieux livres scolaires et les interludes racontés par de jeunes enfants qui lisent le plus sincèrement du monde des résumés de ... l’Histoire de France, évidemment.

L’on n’avait jusqu’à présent jamais su résister aux signes distinctifs d’Opéra Multi Steel, cet écho imparable sur le chant, ces trois voix qui se succèdent et se combinent, ce phrasé incomparable, ces synthés, ces textes, cette basse... Opéra Multi Steel fait partie de cette famille de groupes qui entraînent à la fois le plus grand enthousiasme et l’incompréhension la plus totale, sans aucun intermédiaire. A l’instar de leur musique, il n’y a, dans les réactions qu’elle entraîne, aucun compromis. Quelle tristesse d’imaginer que certains, ayant perdu leur candeur et leur virginité, résisteront à ce disque incontestablement unique et ne succomberont ni à "Ecran Couleur" ni aux cloches de "Lunettes Solaires". Cela est d’autant plus dommage qu’ "Histoires de France" est le meilleur disque à ce jour d’Opéra Multi Steel.

Days of Creation

Wave Records

DAYS of CREATION

Prémonition n°23

Frantz Hémor

Avril 1996

Sabordé après l’album "Stella Obscura", Opéra Multi Steel nous revient par l’intermédiaire inattendu d’un label brésilien avec une élégante compilation retraçant dix ans (1984/1994) d’une carrière discrète mais musicalement riche puisqu’essaimée de quatre albums, quelques simples et une flopée de cassettes. On retrouve à l’écoute de cette compilation chronologique, en dix-sept titres, tout ce qui fit la force et les handicaps de ce groupe français en marge de tous les courants, à la fois en avance et en retard sur son temps et sur les modes, jamais là au moment opportun car certainement trop peu soucieux de coller à un style précis. Si la fidélité d’Opéra Multi Steel à la boîte à rythmes tout au long de ces dix ans peut le rattacher à une mouvance connotée « première moitié des eighties », l’anachronisme, l’éclectisme, voire même l’iconoclastie de son instrumentation où se côtoient guitares, basse, synthés, flûtes, percussions tribales ou minimalistes, psaltérion, mélodica, bruitages en tous genres en font réellement un groupe à part, libre d’expérimenter des ambiances hétéroclites avec toujours ce souci intense de créer des chansons aisément fredonnables mais enluminées d’une manière éminemment personnelle. Certains titre ("Jardin botanique ", "Les Martyrs"…) auraient pu constituer des tubes potentiels mais le sort en décida autrement. Ce recueil est le témoignage fidèle de ce qu’une quasi-totale indépendance artistique peut avoir de bénéfique et de ce qu’un manque de soutien logistique prolongé peut avoir de frustrant pour les musiciens les plus prolifiquement tenaces. Avec des titres évoluant d’ambiances cold en pop synthétique et d’accents médiévaux en délires introspectifs, "Days of Creation" est à même de satisfaire de nombreuses tendances. On regrettera toutefois sur le livret l’absence des textes intégraux qui contribuèrent pour une bonne part à l’hermétisme apparent et à l’unicité de ce groupe réellement atypique.

Stella obscura

Orcadia Machina

STELLA OBSCURA

Presto n°11

1992

Opéra Multi Steel n’est pas signé sur un label, il leur a fallu en créer un : Orcadia Machina, ce qui leur a permis de sortir rien moins que quatre albums, cinq K7s de titres inédits et de participer à une cinquantaine de compilations allemandes, belges, anglaises ou espagnoles. Une telle pugnacité est exemplaire et démontre le mieux du monde à quel point cette approche est si particulière et si novatrice. C’est tout simplement celle de l’éclectisme. Le résultat est donc un foutoir ? Que nenni, non point, il est de la plus belle facture. Le mélange emprunte à la New Wave les synthés et boîtes à rythmes, au rock la batterie électronique et la guitare, au classique les voix pures et éthérées ("Armide", "Tes Lèvres, un Abat-Son" et "Memorias de Vigo") et peut créer par la même une musique indéfinissable, à la fois moderne et ancienne lors de l’utilisation d’instruments anciens tels le psaltérion, le dulcimer, la flûte à bec. Le chant est aussi une richesse pour le groupe qui utilise la voix comme un instrument, en la modelant, lui donnant forme, pour que telle une volute de fumée, elle se love sur la musique. Il faut aussi souligner cette particularité du groupe à utiliser les talents vocaux de ses trois membres fondateurs, ce qui apporte une richesse supplémentaire. Les textes sont de véritables bijoux, ce qui ajoute à la superbe de l’interprétation. Ils sont écrits en français, en anglais ("Pilgrim’s Song"), en allemand ("Les Prophètes") ou en latin ("Benedictus"), ou encore tirés d’un poème du XIIIème siècle ("Memorias de Vigo"). A tout cela vient s’ajouter le côté artistique pictural avec l’impression de magnifiques tableaux sur la jaquette, dans les pages du livret et sur le cd lui-même. Bref, une réalisation parfaite tant en qualité qu’en quantité pour Opéra Multi Steel : un véritable kaléidoscope musical.

Stella obscura

Orcadia Machina

STELLA OBSCURA

Prémonition n°11

Eric Sémenzin

Octobre 1992

Opéra Multi Steel est un groupe libre. La gloire ils s’en fichent. Le succès, ils le regardent de loin, en ont-ils déjà rêvé, d’ailleurs ? Tout ce qui leur importe est de pouvoir sortir leurs disques, tels qu’ils les veulent, et sans se soucier de ce que dicte la mode. C’est évident, Opéra Multi Steel ne colle pas à son époque, mais auraient-ils eu leur place à une époque quelconque ? Leurs têtes sont pleines de drôles d’histoires, où seigneurs, serfs et chevaliers en armure tiennent les rôles principaux et guerroient joyeusement pour sauver la belle princesse emprisonnée dans son donjon. Références uniques pour groupe unique, les véritables inclassables, ce sont eux. "Stella Obscura" ne s’adresse pas aux esprits obtus, mais il est le passage obligé pour qui veut sortir des sentiers battus et rabâchés du rock. Pour poser tout de même quelques jalons, on peut citer The Legendary Pink Dots, qui est certainement le seul groupe actuel capable de déclencher le même sentiment, celui d’avoir l’impression de se trouver devant quelque chose de VRAIMENT différent. De plus, cet album est certainement le meilleur qu’ils aient réalisé jusqu’à présent, car le plus riche et le plus contrasté.

Le bourreau cagoulé n’est pas près de faire rouler leurs têtes dans un panier.

Les Martyrs

Orcadia Machina

LES MARTYRS

Soft Watch

Juin 2012

This four track 3" CD opens with "Tes Lèvres, Un Abat-Son" - a gentle drifting piece of music with at least one finger in COCTEAU TWINS' pie, roving with beautiful grace throughout it's 4'40" distance. "Armide (Automne Mix)" is next - slightly shorter than the previous work. You really can see why they have the word 'Opera' in their name - musically it's a sort of Indie slow Rock/New Age/Folk music but the sound really defies description. The title track "Les Martyrs" is next, a faster piece sung in French by the male vocalist - the plucky bass gives it a feel like The Cure's "Primary" had, except this sounds a touch more lighter & happier than that. This CD finishes with "Gregoire", a change in direction again - and again sung in French. The synth below the rhythm & beat hits you suddenly. This is an odd mix of perky pop music & more moody, ethereal things - at times quite beautiful.

Stella obscura

Orcadia Machina

STELLA OBSCURA

Dark World

1992

Malheur à celui qui ose dire que la scène française ne possède pas d’esprits originaux. Voilà Opéra Multi Steel, formation originaire de Bourges. Le groupe réconcilie habilement passé (instruments à vents dont les flûtes à becs…) et présent (guitares, batteries électroniques, synthés…) et combine musique classique, pop, rock, créant ainsi une grande diversité de sons. Dix-sept morceaux nous sont proposés, tous plus pittoresques les uns que les autres, aux consonances si particulières, qu’elles poussent l’auditeur à se créer son propre espace et à laisser libre cours à son imagination. Nous sommes alors transportés dans un savant voyage à travers le temps.

Comment ? Je ne vous ai pas convaincus ? Découvrez plutôt cet album et vous compléterez facilement les quelques lignes de ma chronique.

Les Douleurs de l'Ennui

Orcadia Machina / Cri du Chat Disques

LES DOULEURS DE l’ENNUI

Prémonition

Eric Sémenzin

Mai 1990

J’avoue que j’éprouve une certaine joie lorsque j’écoute ce disque : originalité à toute épreuve, voix et son de basse unique au monde, textes hallucinants d’obscurité en français, car ici on n’a aucune tare à cacher, le tout baignant dans des ambiances post moyenâgeuses incitatrices au voyage…dans le temps.

Les Douleurs de l'Ennui

Orcadia Machina / Cri du Chat Disques

LES DOULEURS DE l’ENNUI

Trinity N°4

Céline Olivier

La première écoute des " Douleurs de l'Ennui " paru en 1990 et -heureusement- réédité en 1998 sur Lullaby, conduit inexorablement à délaisser les sens/sons communs. Ceux-ci s'abolissent dans les flammes pour donner naissance à une multiplicité de sens à faire tourner la tête. Saisis par une transe, vous entrez dans la danse du derviche tourneur, chapelier des mots tordus, Patrick L.Robin. Les textes sont tantôt parsemés de traces autobiographiques ("Le Phare" ou "Premières Loges"), tantôt de collages détonnants et d'émotions foudroyantes ("Les Reliquaires" ou "Les Douleurs de l'Ennui"). Ce lexique magique qui emprunte au latin, à l'espagnol, à l'arabe... se voit enveloppé par une basse cold-wave ondulante, des synthétiseurs farceurs et aériens et des sons hétéroclites. Aussi sans plus attendre et sûrement pas le Jugement Dernier, embarquez pour des contrées mêlant la gravité de l'enfance, la violence des sens à la folie terrassante. L'écriture stupéfiante (- I'm definitely addicted to-) peu à peu s'immisce dans votre esprit pour ne plus vouloir le quitter. Qui s'adonne à Opéra Multi Steel corps et âme, délaissant querelles de chapelles et poses obligées, s'élève vers un Eternel féérique où dansent de concert anges et démons. Dans un monde déliquescent, nous n'avons décidément que le choix d'une existence rebelle.

Les Douleurs de l'Ennui

Orcadia Machina / Cri du Chat Disques

LES DOULEURS DE l’ENNUI

Krime Sonic n°15

M.P.

Avril 1990

Le voici, le voilà, le nouvel album d’Opéra Multi Steel intitulé "Les Douleurs de l’Ennui" ou "Les Couleurs de l’Ennui" est un recueil de onze chansons toutes aussi étonnantes musicalement que textuellement. Tout est construit sur la base d’un rythme pop entrainant, d’un synthé à la fois planant et dansant et d’une basse mélodique sur lesquels viennent se greffer mélodica, harmonica, pédalier de basse, flutes, psaltérion… qui font de chaque morceau une composition originale. On pourrait croire à la première écoute qu’il s’agit du resuçage d’une pop new wave des eighties, et pourtant, la musique d’OMS ainsi que le chant sont uniques : claviers mystiques, modernes, planants, dansants, chants mélodiques, chœurs religieux, orientaux, médiévaux… mélangeant français, espagnol, anglais, latin et arabe.  La musique d’OMS est personnelle et en même temps universelle. Elle ne se situe nulle part, elle est éclectique. Il s’agit d’une série de pop songs synthétiques arrosées de quelques coups de pinceau bien placés. Certains morceaux feraient à la limite des tubes potentiels ("Le Phare", "Jezabel"…) pour boîte branchée même si là n’est pas l’objectif. La flûte berce nos cœurs monotones, les prières sont électroniques et mélodiques : Lex est quod notamus / Nihil novi sub sole / In articulo mortis / In cauda venenum / Amen. Avec le Sequentia extrait de l’Officium lusorum des Carmina Burana ou la Confession extraite du Prisonnier, OMS ne lésine pas sur les références culturelles et religieuses pour susciter les émotions et éveiller les sens. La pochette représentant une Jeanne d’Arc, photographie de Pierre et Gilles, n’en est qu’une preuve infime.

Pour le reste, procurez-vous l’album.

Les Douleurs de l'Ennui

Orcadia Machina / Cri du Chat Disques

LES DOULEURS DE l’ENNUI

Sur la même longueur d’Ondes

Alain Connangle

1990

Concevant leur troisième album comme une continuité au rythme de leurs chansons, Opéra Multi Steel concilie les gammes du moyen âge et les rythmes de la New Wave jusqu’au bout des instruments puisqu’aux côtés de l’électrique, psaltérion, flûte à bec et dulcimer tiennent leur place. Ces cinq musiciens géniaux, fourmillant d’idées y gagnent une originalité hors-pair. L’imbrication des chœurs à la beauté des nappes de claviers est parfaite. Un goût de l’harmonie envahit les textes dithyrambiques du chanteur à la voix pleine de charme. Vous aussi succomberez à ce rapport de la batterie et de l’électrique avec l’univers des cloitres et des gigs.

Les Douleurs de l'Ennui

Orcadia Machina / Cri du Chat Disques

LES DOULEURS DE l’ENNUI

Sub Rock

Mars 1990

Opéra Multi Steel gagne le « Sub Rock d’Or » de la plus belle pochette du mois. Une jeune et magnifique Jeanne d’Arc en armure fixe le ciel, regard illuminé, plein d’attente, d’espérance et de tristesse. Le genre de pochette à vous donner envie de passer un après-midi au Louvre. Cette photo aux couleurs superbes réalisée par Pierre et Gilles fait que le vulgus-rocker-de-basus tombe forcément amoureux de Jeanne. Lettrage médiéval sur fond noir, avec un jeu de lettres qui transforme le titre "Les Douleurs de l’Ennui" en "Les Couleurs de l’Ennui". Et maintenant, sortons le disque de sa pochette et posons-le religieusement sur la platine. Surprise, surprise, l’album est riche. Synthétiquement, évoquons des morceaux speed façon Orchestral Manœuvres in the Dark avec une voix française, et rajoutons là-dessus du liturgique, du flamenco, un poil de house et plein de trucs étranges. Bonne production. Tous les morceaux ne sont pas parfaits mais "Les Douleurs (Couleurs ?) de l’Ennui" est un disque hors du temps, à écouter, à réécouter. Un produit éclectique et riche comme on aime.

Les Douleurs de l'Ennui

Orcadia Machina / Cri du Chat Disques

LES DOULEURS DE l’ENNUI

Opus Incertum

1990

On va encore dire que je fais du favoritisme mais ce n’est pas ma faute si je trouve génial tout ce que sort Opéra Multi Steel depuis quelques années. Au début, à vrai dire j’avais eu du mal à accrocher mais depuis "Cathédrale", c’est l’addict qui vous cause ! "Les Douleurs de l'Ennui" ne sont pas un remake d’ "A Contresens", plutôt une suite logique, une progression. On sent l’évolution, une subtile (comme tout ce que fait le groupe) transformation. Un son plus rock, autant qu’on puisse dire cela car la musique du groupe garde son style particulier et unique, des textes qui commencent à raconter des histoires (tout en restant toujours aussi délirants) et l’apparition d’une batterie électronique (et donc d’un nouveau comparse JM Bougain). C’est tellement bien que j’ai du mal à préférer un morceau plutôt qu’un autre mais je crois que "Légers et Irréels" et "Eveil total" sont ceux qui m’auront le plus marqué sur cet album (comme ce fut le cas avec "Prométhée" sur l’album "A Contresens").

L’écoute répétée et intensive de cet album me conduit à poser cette question : si on veut de la pop (dans le bon sens du terme) intelligente, pourquoi nous bassine-t-on avec les merdes innommables du Top 50 alors qu’il y a dans le circuit underground des groupes qui font des trucs 10000 fois mieux ? Aurait-on peur qu’on devienne adepte du bon goût ou est-ce encore une histoire de gros sous ? C’est louche tout ça… Enfin vous pouvez acheter "Les Douleurs de l’Ennui" les yeux fermés…En plus la pochette est superbe !

A Contresens

Orcadia Machina

A CONTRESENS

Expressions

Brendan Tracey

Février 1989

"A Contresens" est le deuxième album du groupe sans compter un Maxi 4 titres, un 45T et les œuvres sorties uniquement en K7 sur leur label Orcadia Machina

Cet opus est fidèle au concept de départ : une fascination pour les formes musicales du moyen âge remaniées grâce aux alliages de l’ère industrielle. Sous l’aspect austère et introspectif de moines et de sœurs ascètes se cache un sens de l'humour  tout à fait créatif et original : « Bernadette appears courtesy of herself ». 

Au point de vue de la qualité du son, des arrangements et de la réalisation, "A Contresens" est l’œuvre la plus aboutie de nos amis latinistes de la boîte à rythmes.

A Contresens

Orcadia Machina

A CONTRESENS

Les Amoureux du 24

Shelleyan aka

1989

Opera Multi Steel opère une synthèse de musique synthétique et médiévale retravaillée façon XXème siècle, quoique sans étiquette selon les dires du groupe. 

Des textes (ou plutôt alchimie de mots), très lyriques, quelque peu loufoques (cf "Paulette à la Plage") aux sens ambigus. 

Quant à la musique, je la qualifierais d’émotionnelle, dansante, attachante et surtout pas rébarbative. Une New Wave hors des sentiers hyper battus qui mérite d’être écoutée des deux oreilles.

A Contresens

Orcadia Machina

A CONTRESENS

Prémonition

Eric Sémenzin

1989

Musique : anachronique, mariage impossible entre technologie et instruments d’un autre temps.

Voix : intrigante, étonnante, attachante.

Textes : sacrés, passionnés, obscurs.

Rythmes : chaotiques, syncopés.

Mélodies : sensibles et intelligentes.

Son : minimaliste mais paradoxe ultime, grandiose.

Arrangements : baroques et raffinés.

Style : unique. A mi-chemin entre ce qui ne s’est jamais fait et ce qui ne se fera jamais, le moyen âge à la rencontre du 21ème siècle.

Simple, beau, inclassable, définitivement original.

Ne mourez pas sans savoir…

Opéra Multi Steel

Orcadia Machina

OPERA MULTI STEEL Single

Les Sésames de la Musique

1987

Enrobé dans une superbe pochette dessinée par Speedy Graphito, le premier 45T du groupe affirme une volonté de se démarquer par la recherche de mélodies originales. Malgré quelques petits défauts, les bonnes intentions ne sont pas gommées.

Sur une mélodie arabo-psychédélico-pop (eh oui, aux Sésames on invente des concepts quand il le faut !), les arrangements de "Jamais plus" introduisent quelques mesures de flûte, d’harmonica créant un climat mystique plutôt original. Ce morceau, mené sur un rythme soutenu, n’entraine pas la léthargie. Mais l’abus de boîte à rythmes déshumanise le titre alors qu’un véritable batteur aurait apporté une vibration personnelle. L’autre petit point noir, la voix avec ses « Ova ! ova ! Par contre le doublage de la voix dans le dernier refrain accentue le côté étrange.

Opéra Multi Steel

Orcadia Machina

OPERA MULTI STEEL Single

La Nouvelle République

1987

Opéra Multi Steel ajoute une galette à sa discographie en sortant un nouveau 45 T qui comporte deux titres : "Personne ne dort" et  "Jamais plus". Ce disque marque peut-être un tournant dans la carrière du groupe car la musique présentée est en effet plus nerveuse. « Notre musique est moins intimiste, plus démonstrative » admet Franck Lopez, l’un des membres du groupe. A l’écoute, ce 45 t de bonne facture accuse un ancrage plus net dans le rock (sens large) mais on sent toujours le climat qui fait depuis 1984 l’originalité du son d’Opéra Multi Steel. OMS reste soudé autour des deux frères Patrick L. Robin, Franck Lopez et de Catherine Marie. Au printemps dernier, un guitariste, Xavier Martin, s’est agrégé au groupe, ce qui apporte naturellement un plus. Dernière curiosité : la pochette du 45t est signé Speedy Graphito, un graphiste parisien qui fait beaucoup parler de lui.

Cathédrale

Orcadia Machina

CATHEDRALE

Guts of Darkness

Shelleyan

Mars 2011

Pan ! Départ de boîte à rythmes, entrée de claviers synthétiques, rien de bien surprenant, voilà de la bonne minimal wave des familles made in 80's... Mais que sont ces textes ? "Du Son des Cloches" ? Et cette mélodie sur 'Forme et réforme', elle est d'inspiration médiévale... Qu'est-ce que ça vient fiche en territoire cold wave ? Avènement des musiques froides, modernité, réflexions existentialistes, rien à voir avec ces étranges élucubrations baignées de références mystiques catholiques, d'hédonisme champêtre ou de poésie surréaliste presque enfantine... D'ailleurs quel rapport entre 'Cathédrale' et ce 'Piscine à Tokyo' aux sonorités de jeu électronique ? C'est la surprise Opéra Multi Steel, un groupe à la démarche improbable, capable de mêler références médiévales, musique synthétique et surtout, un sens de l'autodérision frais et salvateur. Il serait en effet trompeur de classer leur travail comme une interprétation moderne de thèmes classiques, nous sommes à des kilomètres de la démarche sérieuse accomplie et poétique d'un Collection d'Arnell Andrea (pour prendre un autre projet de Franck Lopez); ici le second degré règne en maître, un peu trop peut-être, qui contamine exagérément des arrangements aux sonorités mal vieillies ('Piscine à Tokyo', 'Jardin botanique', 'Brasier communiquant'). Le chant pop, les sonorités cheap, tout concourrait à exposer la caricature, même en se replaçant dans le contexte de l'époque. Heureusement, les clips fournis en bonus permettent de mieux saisir la démarche des musiciens, ludique avant tout, celle de joyeux drilles se divertissant d'ambiances mornes, de clichés qu'ils créent eux-mêmes et dont ils se rient ('Frantz est mort'). L'ennui est que ce recul plutôt sain est questionné par de belles pièces, plus sérieuses, telles que 'Massabielle', 'Cathédrale' (réellement envoûtant avec ses ambiances synthético-mystiques), 'Empire' plus proches d'une cold wave grise traditionnelle, qui plus est avec une patte bien personnelle, des arrangements précis et une spontanéité pop. Sur quel pied danser alors ? Opéra Multi Steel, un collectif de médiévistes fleur bleue ? Des caricaturistes post punk ? Des jeunes gens tourmentés ? Non, c'est un peu tout ça à la fois, une mixture osée qui fait qu'on les adore ou qu'on les déteste...'Cathédrale' est le début d'une aventure qui dure depuis vingt-six ans.

Cathédrale

Orcadia Machina

CATHEDRALE

Expressions

Brendan Tracey

Janvier 1986

La nouvelle cathédrale de Bourges est achevée !

Les bâtisseurs Opéra Multi Steel sont à nouveau parmi nous avec une œuvre musicale digne des plus belles architectures du XIIème siècle. Les musiques et les textes puisent leurs sources dans la poésie symboliste tout en se penchant sérieusement vers un style plus actuel qu’est la Cold Wave anglaise de groupes comme Joy Division, Human League ou Cure.

Si vous avez idolâtré leur premier Ep 4 titres, vous allez vous pâmer religieusement devant "Cathédrale". Le style gothique du premier est toujours aussi flamboyant grâce à une alchimie sublime qui leur permet d’élever des structures riches et scintillantes à partir de matériaux froids et inertes comme des synthés ou des boîtes à rythmes, sections lithiques servant de fondation à partir de laquelle s’élèvent les contreforts et les arcs-boutants, propulsés vers le haut par la voix angélique d’instruments nobles tels que la flûte irlandaise, le mélodica ou la guitare. Viennent enfin se poser sous la voûte et entre les arcs-boutants d’énormes vitraux colorés où se transcrivent les élans verbaux et picturaux ayant généralement pour thème l’écoulement du temps et la dissolution des civilisations qui en résulte (par opposition) aux monuments vides du passé qui survivent aux époques révolues que sont justement les cathédrales. Méditez donc cette nouvelle structure fragile, translucide et atemporelle qu’est "Cathédrale" par Opéra Multi Steel.

Cathédrale

Orcadia Machina

CATHEDRALE

37 Poche

Hervé Bourit

Janvier 1986

Découvrir et goûter un nouvel album de ce groupe de Bourges est une occasion trop rare pour la bouder. Après un long silence de près de deux ans qui avait suivi la parution de leur premier Ep quatre titres, ils nous reviennent avec ce "Cathédrale". Une pochette sobre mais hyper soignée comme à l’habitude, renfermant les textes des chansons qui sont cette fois au nombre de dix. Dix perles de climat et d’ambiance où se mélangent, sans cassure aucune, instruments traditionnels, flûtes et cloches, mais aussi synthétiseurs et boîtes à rythmes. Rock médiéval, pop religieuse, textes surréalistes ou pour employer un mot à la mode psychédéliques, tous ces adjectifs sont vrais et faux à la fois car cet opéra qui défile est avant tout un chef d’œuvre d’émotion, quelque chose d’impalpable et de magique.

Cathédrale

Orcadia Machina

CATHEDRALE

Info Mam (Bruxelles)

Février 1986

A chaque nouvelle production de ce groupe de Bourges c’est le même problème : comment présenter sa spécificité, comment les comparer à d’autres groupes plus connus ? Pas que sa musique ne ressemble à rien, non. Plutôt, l’originalité dans la façon de traiter les influences déroute. Opéra Multi Steel est à la croisée des chemins entre ce qu’on appelait à l’époque la pop celtique (cf. l’emploi de la flûte à bec dans le morceau "Forme et reforme") et ce qu’on appelle actuellement la cold wave (qu’on retrouve d’une certaine façon dans le style et aussi dans le look du groupe, ce qui peut paraitre paradoxal).

Cathédrale est à notre connaissance le premier 33 tours du groupe. La dizaine de chansons qu’on y trouve prouve à suffisance le soin mis par le groupe dans l’enregistrement et le mixage d’une multitude d’instruments et de voix. On est loin ici des masses sonores où tout est noyé. De même on remarquera la belle voix de Catherine Marie dans "Attitudes", contrastant avec les voix mâles très « chanson française » de Patrick L. Robin et Franck Lopez.

Les chansons sont entrainantes, sans jamais sacrifier à la facilité ou à un côté commercial. Les textes qu’on peut trouver sur la pochette intérieure ne nous laissent d’ailleurs pas indifférents.

Opéra Multi Steel

Orcadia Machina

OPERA MULTI STEEL Eponyme

Gai-Pied Hebdo N° 1171

Patrick Rognant

Avril 1984

« Rien ne vient, rien ne se passe… ». Cette constatation ouvre le disque du groupe berruyer Opéra Multisteel, qui n’a même pas été invité au Printemps de Bourges qui se déroula sous ses fenêtres. Ce qui illustre bien la précarité du rock et des musiques nouvelles dans un festival dominé par les géants du show-biz. Heureusement, j’ai déniché la perle rare de la ville, cachée en son sein, en la personne de Patrick Lopez, chanteur d’Opéra Multisteel. Leur musique est un savoureux clin d’œil à l’humour situationniste, un peu oublié ; mélange d’instrumentations acoustiques moyen-ageuses et électroniques, créant une fausse pop mélodique aux accents psychédéliques que dément la causticité des textes.

On se demande comment une ville aussi chiante a pu engendrer un tel concept aussi neuf et aussi futuriste, sans doute le côté « Moyen Age électronique » de l’architecture locale ou alors le pesant passé culturel et ésotérique des lieux.

Opéra Multi Steel

Orcadia Machina

OPERA MULTI STEEL Eponyme

Rock Art

Daniel Marin et Ghislain de St Preux

Mai/Juin 1984

Pour finir dans la joie et l’optimisme, voici Opéra Multisteel, groupe de Bourges formé de trois personnes : Patrick L. Robin (chant, percussions électroniques et acoustiques, claviers, textes) Franck Lopez (Chant, claviers, guitare, musiques), Catherine M. Marie (Voix, claviers, pédalier de basses). Leur maxi 45 Tours 4 titres est réalisé sur leur propre label Orcadia Machina. La pochette est d’une rare beauté, originale dans sa forme, réalisée à partir d’éléments de l’Encyclopédie (1751) et de la planche 29 du Perspectives de Jan Vredeman de Vries (1604). Une musique moderne et rythmée dans l’utilisation des percussions électroniques, des claviers et imprégnée d’histoire par l’adjonction de flûtes et cloches. Ici devrait se situer le rock gothique avec tous ses éléments chevaleresques : amour et ballades, poésies et guerres. Le tout rythmé et dansant mais sans trop d’excès. Attention à l’uniformité, l’ennui pourrait rapidement prendre le dessus. On aura au moins appris que le gothique n’a pas pour unique significations l’horreur et l’ennui. Apprenez ! Un son qui se rapproche des premiers Orchestral Manœuvres in the Dark et Human League.

La Guerre de Cent Ans

La Guerre de Cent Ans

Clair obscur

Frédéric Gerchambeau

Septembre 2015

L’Amour est géométrique / Celluloide


Ce nouvel opus de Celluloïde est un hybride. Il s’agit à la fois d’une compile et… Enfin, disons que l’idée de départ était celle d’un CD regroupant cinq titres du groupe dont deux singles, "L’Amour est clair" et "Le Baiser géométrique", mais dans des versions revues à la hausse. Cependant, le projet initial a été très amélioré par l’addition de six covers de titres de Celluloïde par autant de formations de la mouvance Electro-Pop. Le résultat, c’est un album comprenant onze titres (ou plutôt douze si on y ajoute un titre… caché) d’une excellente tenue, à la fois agréable à l’oreille, bourré de compositions variées et bigrement intelligentes, et riche en ouvertures vers d’autres groupes. On sait que Boredom Product, basé à Marseille et dont cet album constitue la 27ème sortie, est une création des membres de Celluloïde, et c’est donc par ce biais que Celluloïde donne à connaître la scène Electro-Pop française. Le côté intéressant de cette histoire est que Celluloïde a visiblement une telle envie de faire connaître d’autres groupes Electro-Pop qu’il profite de toutes les occasions pour donner de la visibilité à d’autres formations similaires.

Et c’est ici que la démarche prend toute sa saveur. Car Celluloïde, de par sa double casquette de producteur et de groupe, sait merveilleusement sélectionner les formations possibles et dès lors, chacune des covers présentes sur cet album est un régal. Cela dit en passant, les membres de Celluloïde ne sont pas exactement des béotiens en matière de reprises. En effet, deux des titres de Celluloïde présents sur cet album en sont. Plus précisément, "Intraveineuse" tire son origine du titre "Intravenous" du groupe norvégien Bel Canto, tandis que "Rêve idéal" est tiré du titre « Perfect Design » du groupe dijonnais Résistance, qui était signé par Facteurs d’Ambiance, un label… marseillais, ce qui boucle la boucle intra-marseillaise avec Celluloïde/Boredom Product.

Tout ceci pour dire qu’un album comme "L’Amour est géométrique", outre le réel plaisir qu’on prend à le jouer et le rejouer, incite à la recherche, à la découverte et à l’approfondissement. Un autre exemple évident de cela est à trouver dans la cover de "La Guerre de cent ans" par Opéra Multi Steel. L’adéquation entre le style néo-médiéval de ce groupe cependant très moderne et ce titre est parfaite. Au point de faire pratiquement passer "La Guerre de cent ans " pour une composition d’Opera Multi Steel. C’est pourtant bien du Celluloïde pur jus. Ce jeu de miroir et de faux-semblant est fascinant et pousse à s’interroger autant sur Opera Multi Steel que sur Celluloïde.

Je pense que ceci était voulu, au moins jusqu’à un certain point. Mais tout l’album est ainsi, rempli d’évidences trompeuses, de non-dits révélateurs et d’invitations à la réflexion. Ah, j’en oublierais presque de vous dire une dernière chose ô combien essentielle : il n’existe que 300 exemplaires de "L’Amour est géométrique", tous numérotés à la main. Alors, si vous en voulez un, un bon conseil, ne traînez pas!

Isolation

Isolation

Prémonition

Frédéric Thébault

Juin 2010

Transmission 30 years with (out) Ian Curtis


Eh bien encore une, une de plus, en 30 ans c’est loin d’être la première et probablement loin d’être la dernière compilation en hommage à Joy Division. Votre serviteur s’est abonné à l’exercice de l’écoute avec rictus de méfiance doublé d’un bâillement d’ennui anticipé, mais le bilan des courses reste positif, bien qu’un chouia mitigé, car comme toutes les compilations, ce n’est pas évident : on y côtoie des styles très divers, on y trouve du bon comme du décalque sans intérêt. Charles de Goal sont les plus forts comme d’hab, avec une version rentre-dedans d’"Insight" plus qu’épatante, Complot Bronswick ont toujours une sacrée créativité et triturent à merveille "Transmission", et mention spéciale pour la version d’Opéra Multi Steel de "Isolation", qui transforme de façon très originale et très jouissive le morceau, sans oublier Guerre Froide qui décidément n’auraient jamais dû s’arrêter pendant trente ans. Bonne surprise enfin de Femme Fatale (même si on aurait préféré le chant de May), de That Summer/ThisIsTheHello Monster, de Collection d’Arnell-Andréa ou de Soup Toxic (sur le bonus mp3). Côté petites déceptions, elles viennent d’abord de grands noms dont on aurait attendu mieux, comme Little Nemo, Clair-Obscur, Babel 17ou Excès Nocturne. Reste que tout cela s’écoute sans déplaisir et que hormis un ou deux ratages complets (trop d’emphase chez Wallenberg ou Ain Soph Aur - tiens ce sont les dernier et premier morceaux de la compilation- alors qu’il n’y a jamais eu d’emphase chez Joy Division mais de la tension et de la colère), l’achat de ce disque est un investissement que vous ne regretterez pas.

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